La loi californienne autorise les employeurs à récupérer les pourboires afin de les partager aux serveurs mais exclut les managers. L'enseigne américaine de cafés va devoir rembourser plus de 100 millions de dollars à ses 120 000 anciens et actuels salariés de Californie.
Cette affaire risque de laisser un mauvais goût de café amer à Howard Schultz, le président fondateur de la chaîne américaine de cafés Starbucks. Ce patron charismatique, qui est revenu aux affaires il y a quelques mois pour revoir la stratégie du géant américain du café vendu en gobelet plastique, cultive le café dans des exploitations équitables et une réputation de patron à la fibre sociale.
Alors qu'il se flatte dans son autobiographie de payer une couverture maladie à tous ses salariés, Howard Schultz vient de se faire épingler pour s'être servi dans la tirelire à pourboires de ses employés. Les faits ont été jugés jeudi par le tribunal de San Diego en Californie. Le juge Patricia Cowett a condamné l'enseigne de cafés à rembourser la somme de 106 millions de dollars à un nombre estimé de 120 000 salariés passés et actifs des 1 400 boutiques Starbucks de l'État de Californie.
Le service n'est pas compris aux États-Unis. La loi californienne autorise les employeurs à récupérer les pourboires afin de les partager équitablement aux serveurs, mais cette législation exclut les managers des pourboires. C'est un certain Jou Chau, barman dans un Starbucks de la station balnéaire de La Jolla, qui a intenté cette action en justice en 2004.
Une class action des serveurs
Il avait remarqué que les chefs de salle percevaient à tort les pourboires des serveurs. Son action a prospéré jusqu'à devenir une action collective (class action) quand la justice a constaté que de nombreuses personnes ayant travaillé chez Starbucks déposaient des plaintes pour le même motif et qu'au total 120 000 plaignants potentiels pouvaient réclamer leur dû.
À l'annonce de sa condamnation, Starbucks a immédiatement fait savoir qu'il allait faire appel de cette décision. Tout le débat repose sur la définition du poste de chef de salle. Selon Starbucks, ce sont des serveurs qui, en plus de leur travail auprès de la clientèle, animent une petite équipe d'employés. Selon les plaignants et le juge californien, ce sont des managers qui donnent ponctuellement un coup de main pour servir les clients et n'ont donc pas droit au pourboire.
Cette affaire est regardée de près par toutes les grandes enseignes américaines de restauration. Véritable institution aux États-Unis, le tip (pourboire) est très encadré et représente chaque année des milliards de dollars que lorgnent le fisc, les employeurs et les salariés des casinos de Las Vegas jusqu'aux pizzerias new-yorkaises.