David Daney, coordinateur du projet, et Jean-Pierre Merlet, responsable de l'équipe chargée de la mise au point de cette poignée intelligente. Pour l'instant testée avec un mannequin cette invention, comme les chaises roulantes et déambulateurs automatisés pourront arriver sur le marché d'ici quelques années.
C'est l'un des grands enjeux de société du moment : la dépendance. Le sujet fait l'objet d'un grand débat national lancé le 8 février dernier. Et dans les laboratoires, on commence à plancher sur des solutions. C'est le cas à l'INRIA. Depuis le premier janvier, 9 équipes de l'Institut (dont 3 à Sophia), et différents partenaires (dontt le CSTB et le CHU de Nice.), planchent en effet sur le projet de Personal Assisted Living. Nom de code : PAL. Ou, comment la robotique peut se mettre au service des plus fragiles. David Daney, qui coordonne le projet depuis le site pilote sophipolitain, nous explique :
Quels sont vos postulats de départ ? : Avec le vieillissement de la population, 1,9 million de personnes pourraient être dépendantes d'ici 2040. Nous ne serons pas suffisamment nombreux, et nous n'aurons pas assez de moyens pour prendre en charge ces aînés. Il y aura alors tout intérêt à les garder au maximum à domicile. Pour diminuer les dépenses publiques, mais aussi, pour les aider à maintenir leur autonomie existante le plus longtemps possible. Nous devons donc trouver des moyens technologiques de les y aider. Et de faciliter également les tâches des futurs aidants. La robotique qui s'oriente de plus en plus vers les services offre des solutions intéressantes.
Sur quelles pistes travaillez-vous ? : Après avoir consulté des professionnels (CHU, associations...) pour connaître les besoins des personnes en perte d'autonomie, nous élaborons différents outils qui devront être à la fois personnalisables, et accessibles au plus grand nombre en termes de coût. Les robots humanoïdes destinés à aider les personnes âgées coûteront plusieurs dizaines de milliers d'euros. Nous souhaitons être bien en deçà, avec des outils ayant néanmoins un maximum de fonctionnalités, et faciles à manipuler.
Par exemple ? : Nous travaillons sur plusieurs thématiques. Tout d'abord, l'évaluation de la fragilité des personnes : la surveillance des chutes, de la bonne prise des médicaments, d'une alimentation suffisante, d'un bon moral. Il existe des caméras, mais elles ne sont pas toujours bien acceptées. Avec la robotique, nous travaillons sur des systèmes de capteurs qui seraient moins invasifs, qui permettraient de détecter le moindre changement de comportement, sans pour autant dévoiler la vie intime de la personne. Ces informations permettent également de préserver le lien entre le senior et sa famille, qui pourra savoir, de manière respectueuse, si tout va bien.
Et la mobilité ? : C'est un de nos autres grands axes de recherche. Pour faciliter les déplacements, nous travaillons sur des chaises roulantes automatiques, des déambulateurs intelligents, qui s'adapteront à la force de l'individu, à l'environnement, et qui seront capables de détecter des chutes. L'idée est de ne pas trop assister les gens, sinon, ils perdent trop vite leur autonomie existante. Nous travaillons aussi sur les transferts, pour par exemple passer du lit à une chaise.
C'est-à-dire ? : Nous mettons au point une poignée intelligente, reliée à des câbles, et pilotée partout dans l'espace par un ordinateur et des capteurs. Ce système permettra de guider et de soutenir la personne dans tous ses mouvements, même les plus compliqués. Il pourra s'adapter à tout environnement, même une chambre d'hôtel. Et être complété par de multiples fonctionnalités, comme des électro-aimants pour attraper les objets.
Quand ces inventions arriveront-elles sur le marché ? : Dans moins de dix ans, je l'espère. Il va falloir encore deux ou trois ans pour la maturation scientifique. Puis encore quelques années pour la la mise au point industrielle.