Quelque 20.000 personnes sont attendues mercredi à Paris sur le parvis des droits de l'homme au Trocadéro pour la vingtième Journée mondiale du refus de la misère, à l'occasion de laquelle le président Nicolas Sarkozy prononcera un discours sur la lutte contre la pauvreté en France. M. Sarkozy doit rappeler, devant le Conseil économique et social (CES), l'objectif fixé au gouvernement de réduire d'un tiers en cinq ans le nombre de personnes vivant au-dessous du seuil de pauvreté (817 euros par mois), qui sont aujourd'hui 7,1 millions. Il devrait évoquer également le "Grenelle de l'insertion" dont il a confié l'organisation au Haut commissaire aux solidarités actives, Martin Hirsch.
Le mouvement ATD-Quart Monde, dont le fondateur, le père Joseph Wresinski, a lancé en 1987 le premier rassemblement contre la misère au Trocadéro, s'est félicité lundi que M. Sarkozy ait choisi ce jour pour présenter ses objectifs. Mais comme la majorité des associations de lutte contre l'exclusion, ATD Quart Monde réaffirme ses craintes de voir "sacrifiés" les plus pauvres au profit des plus proches de l'emploi. "Nous, ce que nous voulons, c'est l'éradication de la pauvreté", explique le président d'ATD, Pierre Saglio, "on ne veut pas un Grenelle pour +un tiers+ des pauvres, tandis que les autres seront encore plus abandonnés". "Prenons le temps et donnons-nous des objectifs pour que change la vie de tous les démunis, pas seulement en augmentant leur revenus, mais en agissant sur le logement, l'illettrisme, la santé", poursuit-il. Des personnes démunies, militantes d'ATD, vont remettre à M. Sarkozy, en marge de son discours, une "déclaration de solidarité" rédigée par des défenseurs des droits de l'homme et signée déjà par 114.000 personnes. Le chef de l'Etat a déjà reçu lundi à l'Elysée une douzaine d'associations de lutte contre la misère. Alors que le 17 octobre se déclinait localement en France les années précédentes, près de 20.000 personnes, militants, "volontaires" et permanents du mouvement venus en autocar et en train de toute la France, sont attendues pour le 20ème anniversaire de l'appel du père Wresinski et de la pose d'une dalle du refus de la misère sur le parvis du Trocadéro. Ce sera aussi le 50ème anniversaire d'ATD-Quart Monde. La journée sera "encore plus internationale que les autres années", promet M. Saglio. Ce rendez-vous a pris un caractère mondial à partir de 1993, lorsque l'ONU a décidé de faire du 17 octobre la "Journée internationale pour l'élimination de la pauvreté", seule journée de l'ONU issue de l'initiative d'une petite ONG, rappelle ATD. Mercredi, la parole sera donnée aux personnes démunies et à celles qui vivent avec elles. "Trop souvent on fait parler les gens ou les associations qui aident les pauvres, là, ce sont eux qui ont la parole, non pas pour se plaindre ou réclamer, mais pour témoigner et échanger", explique le délégué national d'ATD, Bruno Tardieu. "Aujourd'hui, on a le sentiment que s'installe un apartheid social, on entend un discours sur les bons pauvres et les mauvais pauvres, les personnes très démunies sentent une augmentation de la tension", ajoute-t-il. Des Villages de la solidarité, installés dès le matin, proposeront forums, ateliers, débats, animés par une cinquantaine d'associations, pour tenter de "casser" le clivage entre nantis et démunis.