A La Charité-sur-Loire (Nièvre), Christine Boutin, la ministre du logement, était manifestement ravie, jeudi 8 novembre, d'écouter Pascal Jacob, président du groupe qui porte son nom, lui présenter la nouvelle ligne de production d'ossatures de maisons en bois.
Ce procédé industriel - qui consiste à fabriquer en atelier toute la structure d'une maison (charpente, murs, cloisons, parquets) en prévoyant les emplacements des équipements électriques et sanitaires - lui permettra, d'ici à 2010, de doubler sa production jusqu'à 2 000 maisons par an.
Une fois sur le site, le bâtiment est monté en trois jours par trois ou quatre personnes dont un grutier. Economie de temps donc, mais aussi de personnel dans un secteur qui souffre d'une forte pénurie de main-d'oeuvre.
Qui plus est, les qualités du bois et des cloisons, de 14 à 20 centimètres d'épaisseur, associant plusieurs couches d'isolant, sont excellentes sur le plan énergétique et acoustique. Ces maisons sont classées en effet "basse consommation", avec une dépense d'énergie inférieure à 50 kilowattheures par mètre carré et par an, pour le chauffage et l'eau chaude.
Le prix de revient, hors terrain, varie de 63 000 à 82 000 euros TTC pour des maisons de 60 à 95 m2. Quelque 55 de ces maisons viennent d'être livrées à Bourges.
La ministre entrevoyait là une des solutions pour, à la fois, produire 500 000 logements par an, ce qui suppose d'accélérer le rythme actuel de 20 %, et permettre l'accession des foyers modestes à la propriété tout en tenant l'engagement du Grenelle de l'environnement de bâtir des habitations à basse consommation. " Les solutions de filière sèche, à ossature bois, acier - comme les fameuses Maisons Phénix -, ou mixte, même si la maison a, finalement, un aspect traditionnel, permettent des gains de productivité et une réduction des coûts, sans sacrifier à la qualité et au confort", souligne Christian-Louis Victor, président de l'Union nationale des constructeurs de maisons individuelles qui auront, en 2007, bâti 204 000 maisons, pour un prix moyen de 113 000 euros et une superficie de 115 m2, auquel il faut ajouter 35 000 à 40 000 euros de terrain, hors zone urbaine.
LE COÛT ÉLEVÉ DES TERRAINS
Trouver des terrains à prix accessible reste un épineux problème largement sous estimé par Jean-Louis Borloo. Le ministre de la cohésion sociale avait, le 25 octobre 2005, annoncé vouloir produire 20 000 à 30 000 "maisons à 100 000 euros" par an.
Deux ans plus tard, il est très loin de ses objectifs. Les 30 communes qui ont adhéré à l'Association des maisons à 100 000 euros - opportunément rebaptisée Association française d'accession populaire à la propriété (AFAP) - prévoient de livrer environ 800 maisons en 2008, au prix moyen de 120 000 euros. Vingt-cinq d'entre elles, seront livrées, fin 2007, à Epinay-sur-Seine.
Plusieurs promoteurs privés tentent eux aussi de répondre à la demande des ménages et aux préoccupations des maires de produire du logement abordable.
Icade Pierre Pour Tous, filiale de la Caisse des dépôts, a été précurseur en la matière, en livrant, dès octobre 2005, 44 logements pour un prix de 80 000 à 120 000 euros, situés près du Val Fourré, à Mantes-la-Jolie, exemple qui avait inspiré M. Borloo. Icade veut aujourd'hui étendre l'expérience, avec l'aide des municipalités : "Nous utilisons tous les dispositifs spécifiques, comme la TVA à 5,5 % dans les zones de rénovation urbaine, la prime aux acquéreurs, de 5 000 à 15 000 euros, ou la prise en charge d'une partie du coût du foncier par les municipalités", détaille Gaëlle Velay, directrice du développement d'Icade Pierre Pour Tous.
Quelque 55 logements ont ainsi été livrés, à Meaux, pour un prix allant de 101 000 euros (pour 80 à 90 m2) à 160 000 euros, réservés aux primo-accédants venus du parc HLM. A Saint-Raphaël (Var), le maire et Icade proposent aux jeunes couples travaillant sur la commune 120 logements à 2 100 euros le m2, 40 % sous le prix du marché. Au total, Icade Pierre Pour Tous mène une dizaine de projets pour 400 logements.
Le promoteur Bouygues Immobilier a, lui, créé, en 2006, les maisons Elika et acquis, depuis, un portefeuille de terrains pour bâtir environ 900 maisons. Les premières seront livrées à Verdun (Meuse), pour des prix allant de 120 000 à 140 000 euros, terrain inclus.
Même avec les techniques de construction les plus économes, la clef des maisons bon marché reste décidément entre les mains des maires, seuls en mesure de débloquer des terrains.
Isabelle Rey-Lefebvre
Article paru dans l'édition du 16.11.07.