L'ancien vice-président américain Al Gore, colauréat du prix Nobel de la paix, a estimé dimanche à Oslo que les mécanismes de l'économie de marché pouvaient être les meilleurs outils pour lutter contre le changement climatique en permettant de "donner un prix" au CO2.
A la veille de la remise du Nobel qui lui a été conjointement attribué avec le Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (Giec), M. Gore a plaidé pour l'instauration d'un marché carbone à l'échelle mondiale et pour la mise en place d'une taxe carbone.
"Les marchés distribuant plus d'argent en une heure que les gouvernements du monde entier ne le font en un an, nous devons trouver un moyen d'exploiter l'énergie et la vitalité du marché pour aider à réduire les émissions de CO2", a dit l'ancien vice-président, candidat malheureux à la Maison Blanche
"Il nous faut mettre un prix sur le carbone", a-t-il déclaré lors d'une conférence de presse à l'Institut Nobel d'Oslo, une ville où --signe peut-être du réchauffement climatique-- la neige a fait une timide et tardive apparition dimanche.
Le dioxyde de carbone (CO2) est le principal gaz à effet de serre parmi les gaz accusés d'être à l'origine du changement climatique.
Récompensé par le comité Nobel pour avoir tiré la sonnette d'alarme sur le changement climatique avec son documentaire "Une vérité qui dérange", M. Gore préconise la mise en place d'un marché mondial des émissions de CO2, à l'instar de celui qui existe déjà dans l'Union européenne.
Imaginé par les pays signataires du protocole de Kyoto, le marché du carbone permet d'échanger des permis d'émission, ou "droits à polluer": il vise à endiguer les émissions de CO2, en imposant des quotas aux pollueurs tout en leur permettant d'acheter des droits d'émission à ceux qui polluent moins.
"Je suis ardemment favorable à une taxe carbone, d'un montant élevé et dont les recettes seraient rendues aux gens sous la forme d'un rabais progressif qui décourage les émissions de CO2", a aussi déclaré M. Gore, en précisant qu'un tel mécanisme n'accroîtrait pas la pression fiscale.
Il s'agit là aussi de "donner un prix" à la pollution de l'atmosphère, en taxant les produits en fonction de leurs émissions en CO2.
M. Gore, 59 ans, a souligné que les pays les moins affectés par le réchauffement climatique se devaient d'être solidaires avec les Etats les plus vulnérables, souvent déjà pauvres, citant Martin Luther King qui disait qu'"une injustice commise quelque part est une menace pour la justice partout".
"De la même façon, l'augmentation des émissions de CO2 quelque part représente une menace pour l'avenir de la civilisation dans le monde entier", a-t-il affirmé.
Président du Giec, une émanation de l'ONU qui partage le Nobel pour son travail de documentation du réchauffement planétaire et de ses conséquences dramatiques, l'Indien Rajendra Pachauri s'est pour sa part dit optimiste sur l'issue de la conférence de Bali.
La communauté internationale est actuellement réunie sur l'île indonésienne pour tenter de s'entendre sur une feuille de route de négociations en vue d'un accord de réduction des gaz à effet de serre visant à prolonger au-delà de 2012 les engagements pris dans le cadre du protocole de Kyoto.
"Les données scientifiques sur le changement climatique sont de mieux en mieux comprises (...) Les signaux émanant des dirigeants réunis là-bas sont très clairs: le temps des questions est terminé, ce dont nous avons besoin maintenant, c'est des actes", a-t-il dit.
MM. Gore et Pachauri, au nom du Giec, recevront le Nobel --un diplôme, une médaille d'or et un chèque de 10 millions de couronnes suédoises (environ 1,1 million d'euros)