Le contact avec des pesticides au cours des travaux agricoles augmenterait le risque d'asthme d'origine allergique ("atopique") chez les fermières, selon une étude publiée dans le premier numéro de janvier de l'American Journal of Respiratory and Critical Care Medicine.
Dans cette population sous-étudiée, "toute utilisation de pesticides à la ferme est uniquement associée à un asthme atopique", constatent les auteurs de l'étude. Le risque était majoré de près de 50 % chez les femmes appliquant ou mélangeant les pesticides.
Une équipe américaine dirigée par Jane Hoppin (Institut national des sciences de la santé environnementale) a examiné les déclarations de plus de 25 000 agricultrices de Caroline du Nord et de l'Iowa participant à une vaste étude épidémiologique.
Elle a pu ainsi distinguer 702 femmes rapportant un diagnostic d'asthme, établi par un médecin, dont 282 souffraient de sa forme atopique - accompagnée d'eczéma ou de rhume des foins.
L'étude met en lumière un lien entre le fait d'employer des pesticides et la survenue de cette affection - le risque est majoré de 46 % par rapport aux non-utilisatrices. "Cette association avec les pesticides est plus prononcée chez les femmes qui ont grandi dans une ferme", notent les auteurs de l'étude.
UN FACTEUR PROTECTEUR NON ÉLUCIDÉ
Dans la population générale, où la fréquence de l'asthme est plus élevée, "il est vraisemblable que l'association avec les pesticides soit masquée", commente Jane Hoppin.
En effet, le fait d'être née dans une ferme, ce qui était le cas de 61 % des fermières, apparaît comme un facteur protecteur important contre l'asthme atopique (risque inférieur de 45 % à celui des femmes nées hors exploitation agricole) et même contre l'asthme non atopique (risque inférieur de 17 %). Les femmes ayant grandi à la ferme mais ne manipulant pas des pesticides présentent le risque le plus faible d'avoir un asthme atopique (risque inférieur de 59 % par rapport à celles nées hors milieu agricole et n'utilisant pas de pesticides).
Cet effet protecteur paraît "si énorme, selon Jane Hoppin, qu'il est difficile de le contrecarrer". Il n'est pas, pour l'heure, élucidé. Au total, les auteurs concluent que l'exposition précoce aux pesticides dans les exploitations agricoles module le risque d'asthme allergique.
L'étude a également permis de distinguer l'impact des divers produits : 7 insecticides sur 16, 2 herbicides sur 11 et l'un des 4 fongicides étaient significativement associés à l'asthme atopique. Seule la perméthrine était associée à l'asthme non atopique.
LE MONDE
Paul Benkimoun
Article paru dans l'édition du 10.01.08.