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Le Rhône est-il totalement pollué par les polychlorobiphényles ?
Les dernières analyses effectuées en Ardèche et dans la Drôme montrent que la contamination à ces PCB - souvent connus sous le nom commercial de pyralène -, interdits en France depuis 1987, car potentiellement cancérigènes, s'étend bien au-delà de Lyon, où la pollution avait été découverte en 2005. Les préfectures de l'Ardèche et de la Drôme, après celles du Rhône, de l'Isère et de l'Ain, viennent de prendre un arrêté d'interdiction de consommer du poisson du fleuve et de ses canaux de dérivation.
Le périmètre s'étend désormais sur 200 kilomètres et pourrait encore être élargi : le Vaucluse, le Gard et les Bouches-du-Rhône attendent les conclusions d'analyses avant de prendre d'éventuelles mesures de protection similaires. Dans la Drôme, les résultats des prélèvements réalisés sur six espèces de poissons ont montré une contamination allant jusqu'à 59 picogrammes/gramme (pg/g), alors que l'Organisation mondiale de la santé (OMS) a fixé à 8 pg/g la concentration admissible en dioxine et PCB dans les poissons destinés à la consommation humaine. Le poisson le plus contaminé présentait une dose 40 fois supérieure à la dose acceptable quotidiennement.
L'origine de cette pollution n'a pas encore été formellement éclaircie. Mais, d'après les premiers éléments d'enquête du Cemagref (Institut de recherche pour l'ingénierie de l'agriculture et de l'environnement), à qui la préfecture du Rhône a confié une étude, elle serait ancienne - antérieure à 1987 - et due à plusieurs sources. Parmi les sources statiques, le Cemagref a localisé avec certitude l'usine Tredi, située près de Saint-Vulbas, dans l'Ain. Spécialisée dans le traitement des déchets spéciaux, notamment des transformateurs contenant des PCB, elle rejetait dans les années 1980 une partie des résidus de son activité dans le Rhône. Mais cette entreprise fait désormais l'objet d'un suivi régulier et d'autorisation préfectorale.
"Tredi rejette désormais des PCB à des niveaux inférieurs aux seuils tolérés par l'OMS", assure Alain Espinasse, le directeur adjoint du secrétariat général aux affaires régionales de la préfecture de Rhône-Alpes. Les enquêteurs n'ont pas identifié d'autres sources industrielles, mais évoquent l'existence d'une pollution plus "sauvage", le fleuve ayant servi de dépotoir, pendant des années, aux habitants peu soucieux de l'environnement, qui y jetaient par exemple leurs batteries usagées. Parmi les autres facteurs de pollution possibles sont mentionnés les remblais ayant servi de comblement des lônes, les bras morts du Rhône.
Pour le Cemagref, la persistance de la pollution s'expliquerait par le fait que les PCB, très peu solubles, se seraient accumulés dans les sédiments du fleuve, contaminant durablement les poissons. Les chercheurs ne parviennent cependant pas à comprendre le pic actuel de contamination, vingt ans après l'interdiction des PCB, alors qu'ils avaient enregistré une stabilisation des niveaux de ces produits chez les poissons il y a quelques années. "Une des explications pourrait être la modification des débits du fleuve, qui aurait fait remonter en surface des couches sédimentaires polluées aux PCB", explique Alain Espinasse.
Face à cette pollution majeure du Rhône, la préfecture de Rhône-Alpes a décidé de lancer à l'automne une étude approfondie, associant différents partenaires, les services sanitaires, vétérinaires, industriels, environnementaux de l'Etat, mais aussi les associations comme la Frapna (fédération Rhône-Alpes de protection de la nature) et les collectivités territoriales, qui dans ce dossier de pollution ont porté plainte contre X.
La préfecture de Rhône-Alpes veut se montrer rassurante à l'égard des populations et précise que les différents arrêtés pris n'interdisent pas la baignade, le simple contact avec l'eau polluée par les PCB n'étant pas considéré comme dangereux pour l'homme.
La contamination se fait par ingestion d'animaux ou de produits d'origine animale contaminés. Les autorités préfectorales font valoir que la "toxicité aiguë des PCB est faible pour l'homme et qu'une exposition accidentelle de courte durée n'a pas de conséquence grave". Les mêmes sources précisent toutefois qu'une exposition aiguë à forte dose est associée à des irritations de la peau et plus rarement des infections hépatiques, neurologiques, des bronchites chroniques, des maux de tête et vertiges et parfois de l'impuissance. Des troubles qui peuvent être irréversibles et entraîner des cancers.
Des analyses devraient être prochainement étendues à de nouvelles espèces, comme les anguilles, et à de nouveaux polluants, comme le mercure.
Sophie Landrin
Article paru dans l'édition du 27.06.07.
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Une mystérieuse pollution souille le Rhône
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