Innovation vs pollution : recycler pour mieux consommer?
Cette dernière option est fondamentale. Car les pièces qui composent nos ordinateurs (unités centrales, claviers, cartes électroniques, téléphones portables et autres batteries), inoffensives au premier abord, contiennent de nombreuses substances chimiques comme le cadmium, le mercure, le plomb, l'aluminium ou le cuivre, nuisibles à l'environnement et aux personnes. Principales retombées de ces substances sur la santé: avortements, déformations du fœtus, risques pour l'enfant... Les déchets peuvent aussi polluer l'eau, et générer ainsi des risques sanitaires.
Et dans les pays en voie de développement, la situation est de plus en plus catastrophique. C'est en effet là qu'un grand nombre de nos déchets électroniques atterrit, pour être réutilisé ou détruit.
Selon la Basel Action Network, une organisation qui lutte contre le commerce toxique au niveau mondial, 500 conteneurs de matériel informatique d'occasion arrivent chaque mois au Nigeria, dont 75% de la cargaison se révèle inutilisable et est détruite ou abandonnée.
Se débarrasser proprement de ces déchets au lourd potentiel toxique se révèle donc être une urgence, surtout quand on sait que
20 à 50 millions de tonnes de déchets électroniques sont générées chaque année dans le monde et que le volume de ces e-déchets augmente de 3 à 5% par an en Europe. (
source: Greenpeace).
A l'échelle européenne, plusieurs directives existent qui légifèrent sur les questions environnementales. En ce qui concerne le recyclage,
la Directive européenne DEEE (déchets d'équipements électriques et électroniques), votée en 2003, vise à collecter et traiter les déchets électroménagers. Transposée en France au mois d'août 2005,
elle est entrée en vigueur le 15 novembre 2006. Elle impose aux fabricants et aux distributeurs de déployer des systèmes de récupération et de traitement de ces e-déchets, et de reprendre le matériel usagé.
Les commerçants, pour leur part, doivent également récupérer gratuitement les anciens produits pour tout achat d'un objet neuf équivalent, et certaines collectivités locales et associations, comme Emmaüs, proposent aux utilisateurs de déposer leurs appareils dans leurs locaux.
La Directive concerne aussi les particuliers qui ont désormais l'obligation de ramener leur matériel usagé, et doivent s'acquitter d'une taxe spéciale incluse dans le prix des produits. Celle-ci, comprise entre 10 cents pour un téléphone portable et 13 euros pour un réfrigérateur, vise à subvenir en partie à la prise en charge et au recyclage des déchets.
Les initiatives se multiplient chez les géants de l'informatique...
Et il semble que les choses avancent. Ainsi Apple, épinglé par Greenpeace pour son manque d'engagement pour l'environnement et le développement durable, a annoncé récemment
dans une lettre ouverte sa volonté de recycler d'ici 2010 30% des produits vendus sur les 7 dernières années, contre 13% en 2007.
Quant au chinois Lenovo, il a mis en place en décembre 2006 un système gratuit de recyclage des PC de bureau, des portables, des moniteurs et des serveurs en Chine. Il offre également des programmes de recyclage dans chaque pays client.
...et dans le monde des télécommunications
Du côté de la téléphonie, les professionnels se mobilisent. Car les combinés mobiles, prévus initialement pour durer 7 ans, sont généralement
renouvelés tous les 18 mois, en raison de l'usure des consommables et de la volonté des consommateurs d'acheter un téléphone dernier cri. Si l'on sait que plus de
2.6 milliards de personnes possèdent désormais un téléphone mobile (
source : Idate), le nombre de combinés inutilisés, jetés ou abandonnés, s'annonce très important...
Faut-il alors rappeler le potentiel toxique que renferment ces téléphones? 1 kg de piles alcalines mis en décharge pollue entre 10 et 30 m3 de terre et contamine l'eau de nappes souterraines. Quant à une simple pile bouton au mercure, elle pollue 1 m3 de terre pendant 50 ans...
Pour pallier ces risques, l'opérateur français
Orange a signé en 2005 un accord de partenariat avec une société spécialisée dans le recyclage des terminaux et des accessoires, Fonebak. But de la manœuvre: installer des bacs de recyclage dans les établissements concernés (points de vente...). Les combinés recueillis sont ensuite réparés et revendus si leur état le leur permet, ou retraités dans le but de limiter au maximum la capacité de pollution.
Deuxième opérateur mobile français,
SFR propose également un programme de recyclage de ses mobiles. Ceux qui peuvent être réutilisés sont envoyés dans les pays émergents et les bénéfices dégagés sont reversés à l'association La Voix de l'Enfant. L'opération est plutôt intéressante: en 2005, ce ne sont pas moins de 400 000 euros qui ont été reversés à l'association. Sur la même ligne citoyenne,
Bouygues Télécom distribue les bénéfices à la Fondation Nicolas Hulot, qui organise des séjours de sensibilisation à l'environnement pour les enfants.
Ces initiatives, si elles sont louables, ne doivent pas faire oublier que, dans la lutte pour la préservation de l'environnement, le recyclage fait plus figure de placebo que de véritable remède: celui de concevoir en amont des composants moins toxiques. La route est encore longue...