La France rejette encore beaucoup trop de pesticides dans l'environnement et notamment dans les nappes phréatiques.
Bruxelles vient d'ailleurs de condamner l'État français à 28 millions d'euros d'amende pour des dépassements de seuil de pollution sur neuf zones de captage d'eau en Bretagne. Et pourtant, les agriculteurs utilisent aujourd'hui nettement moins d'intrants qu'il y a dix ou vingt ans. D'après les industriels qui vendent ces produits, la vente de pesticides et autres fongicides a baissé de 13 % entre 1999 et 2006. Selon l'Union des industries de la protection des plantes (UIPP) qui représente les vendeurs de pesticides (produits phytopharmaceutiques) le marché en France est passé de 2,1 milliards d'euros en 1999 à 1,7 milliard en 2006. En volume, la chute est encore plus spectaculaire, puisque sur la même période la consommation des agriculteurs est passée de 120 000 tonnes à 71 000 en 2006. Toujours d'après l'UIPP, les agriculteurs baisseraient de 2,2 % par an leur consommation de produits phytosanitaires. Plusieurs facteurs expliquent cette tendance. Les règlements se sont nettement renforcés. « Les agriculteurs ne peuvent pas épandre quand ils veulent, où ils veulent. Les périodes et les quantités de traitement sont de plus en plus encadrées et ont été renforcées avec la dernière loi sur l'eau », rappelle Antoine Crabit, en charge des questions économiques à l'UIPP. D'autant que pour responsabiliser davantage les agriculteurs, la loi sur l'eau, votée en décembre, a prévu une redevance liée à l'utilisation des produits phytosanitaires fondée sur le principe pollueur-payeur.
Concentration du marché
Les comportements agricoles évoluent aussi. Entre 1950 et 2000, les doses moyennes de pesticides ont diminué, passant de 1,3 kg par hectare à moins de 150 grammes
Cette évolution des mentalités mais surtout cette baisse structurelle des ventes de produits phytosanitaires oblige l'industrie à revoir ses modèles économiques. « Nous avons ces dernières années assisté à une concentration importante du marché », indique Antoine Crabit, de l'UIPP. Il y a une vingtaine d'acteurs aujourd'hui en France, alors qu'on en dénombrait le double il y a tout juste dix ans. La dernière société française du marché, Cerexagri, est d'ailleurs en train d'être rachetée par le géant indien United Phosphorus. Les 19 sociétés présentes en France sur ce secteur ont toutes une dimension internationale. Or « les contraintes environnementales dans les pays émergents ne sont pas les mêmes qu'en Europe », résume Antoine Crabit. Désormais, l'avenir des pesticides se joue en Asie.