Abondance n'est pas le seul domaine skiable à connaître d'importantes difficultés. Le tribunal de commerce de Lyon vient de placer le groupe Transmontagne en redressement judiciaire.
C'est sans doute la première station alpine victime du réchauffement climatique. Abondance en Haute-Savoie vient en effet de décider d'arrêter définitivement ses remontées mécaniques, frappées par un déficit endémique en raison du manque de neige.
Alors que les alertes scientifiques se multiplient depuis les années 90, cette douloureuse décision prise en juin par le conseil municipal frappe au coeur la petite commune située à 930 mètres
Abondance, située entre le Mont-Blanc (4.810m) et le lac Léman, n'est pas le seul domaine skiable à connaître d'importantes difficultés. Le tribunal de commerce de Lyon a placé le 10 juillet le groupe Transmontagne -dont l'essentiel des stations sont situées à moyenne altitude- en redressement judiciaire pour une période de six mois.
La société basée à Villeurbanne (Rhône) emploie près de 270 salariés permanents et plus d'un millier de saisonniers. Elle est notamment présente sur les domaines de Chamrousse (Isère), Super-Dévoluy (Hautes-Alpes), La Tania
Transmontagne, qui avait décroché en 2003 le contrat d'exploitation du Ski Dome de Dubaï, a affiché des pertes de 8,2 millions d'euros sur l'exercice 2006-2007 pour un chiffre d'affaires de 63,5 millions. Selon la CGT
"Les remontées mécaniques, c'est comme une cigarette: tout part en fumée", se désole Serge Cettour-Meunier, le maire d'Abondance, dans un entretien à l'Associated Press. La commune de 1.374 habitants, dont le budget annuel est de 2,2 millions d'euros, a enregistré un déficit de 640.000 euros dans ses remontées mécaniques en 2006.
"La commune ne peut plus payer", avoue avec déchirement le maire qui se refuse d'augmenter encore les impôts locaux. Il constate une baisse régulière de la fréquentation de sa station dont le domaine skiable ne dépasse pas les 1.700m d'altitude. "Le ski redevient un sport de riches; il faut avoir les moyens pour aller à Val d'Isère (Savoie)", estime M. Cettour-Meunier qui s'est vu refuser toute aide du conseil général de Haute-Savoie afin de poursuivre l'exploitation du domaine de l'Essert, jugé désormais non rentable.
L'annonce de l'arrêt de la télécabine et des téléskis est tombée comme un couperet dans le village où, depuis 1964, toute l'activité économique repose sur ce que l'on appelait alors "l'or blanc".
Refusant de baisser les bras, une partie des habitants se sont donc regroupés dans un collectif. Conscient que l'avenir de la commune n'est plus dans le ski, le président du collectif, Paul Girard, souhaite toutefois reprendre l'exploitation du domaine skiable et demande une subvention de 200.000 euros pour ouvrir dès l'hiver 2007-2008. "L'objectif est de maintenir au moins encore pendant cinq ans l'activité ski afin de préparer l'avenir et nous permettre de prendre un virage", explique-t-il à l'AP.
La fermeture du domaine skiable d'Abondance ébranle le monde des sports d'hiver qui irrigue l'économie de pratiquement toutes les vallées alpines. La station voisine de La-Chapelle-d'Abondance envisage même de changer de nom pour éviter tout amalgame. Les propriétaires de terrains dans la vallée craignent un effondrement général de l'immobilier de montagne.
"Le problème d'Abondance est structurel plus que conjoncturel", assure Jean-Charles Simiand, président du Syndicat national des téléphériques et des remontées mécaniques. Il reconnaît cependant que, "progressivement, les stations de moyenne montagne doivent s'adapter". "Il y a une diversification possible mais personne n'a encore trouvé d'activité de substitution au ski", avoue-t-il.
Chez les investisseurs et les financiers, le discours se veut rassurant à l'égard de la moyenne montagne. "On a toujours su qu'il y avait une part de variation du chiffre d'affaires lié à la nature du produit", observe Mireille Faidutti de la Caisse
Néanmoins, les petites stations-villages avouent rencontrer de plus en plus de difficultés pour trouver investisseurs et financements. Saint-Pierre-de-Chartreuse (Isère), située à 900m d'altitude, a dû faire appel à une souscription publique pour moderniser l'une de ses remontées. L'installation prête pour l'hiver 2006-2007 n'a démarré, faute de neige, que pour la saison d'été 2007.
"La tranche d'altitude 900/1.500m est celle où le réchauffement climatique va poser le plus de problème", avertit Gérald Giraud, ingénieur au Centre d'étude de la neige (CEN) de Météo-France à Grenoble, confirmant des rapports alarmants comme celui du Programme des Nations unies pour l'environnement (PNUE) en 2003 ou celui de l'OCDE en février dernier.
"Même s'il y a des variabilités inter-annuelles très fortes, la tendance globale dans cette tranche est une baisse spectaculaire de l'enneigement de l'ordre de 64 centimètres