À grands coups de prototypes futuristes ou de labels «écolo», les constructeurs veulent convaincre les consommateurs que leurs modèles sont plus «propres» que ceux de leurs concurrents. La stratégie de communication est bien rodée, mais les marques n’ont pas vraiment le choix.
La Commission européenne a déclaré la guerre au CO 2, responsable du réchauffement de la planète. Objectif pour 2012 : 130 grammes de CO 2 par kilomètre pour les moteurs (contre 162 grammes par kilomètre en Europe en moyenne en 2006) plus 10 grammes supplémentaires par kilomètre obtenus grâce aux progrès des pneus ou de la climatisation. Deuxième contrainte, la norme Euro 4, qui réglemente l’émission de gaz polluants ou néfastes pour la santé.
Quelle technologie va s’imposer ? Tout est possible. Le japonais Nissan, filiale de Renault, consacre environ 40 % de son budget de recherche aux futurs modes de propulsion. «Au sein du groupe Renault-Nissan, nous développons toutes les options envisageables.
Nous les mettrons sur le marché si nous pouvons les offrir à un prix raisonnable», explique un porte-parole de Renault. Le bon vieux moteur à combustion a, cependant, encore de beaux jours devant lui. «On peut gagner de 15 % à 20 % de rejet de CO2 à horizon 2010», estime Rémi Cornubert, analyste chez Oliver Wyman. Principal levier : le poids. Chaque gain de 1 % entraîne une baisse de 0,8 % de CO2, selon la fédération Transport & Environnement (T & E).
Pour l’instant, les Français mènent cette course des «petits pas». PSA est le constructeur le plus propre d’Europe (avec 142 grammes de CO2 par kilomètre en 2006, selon T & E), suivi par Fiat et Renault. Autre facteur d’amélioration : l’optimisation du rendement des moteurs. Via le «downsizing» (qui permet de réduire leur taille, et donc la consommation sans sacrifier la puissance) ou le contrôle par électronique de l’injection de l’essence.
Réduire la dépendance au pétrole
Les Français sont aussi bien placés sur le diesel – 70 % des ventes dans l’Hexagone –, notamment PSA, numéro un mondial. Avantage : 20 % de CO2 de moins que l’essence. Les derniers filtres à particules, inventés à l’origine par PSA, permettent de neutraliser les éléments polluants émis par le gazole. Ce carburant n’a cependant convaincu ni les Américains ni les Japonais.
Contraints de réduire leur dépendance au pétrole, les constructeurs planchent aussi sur des modes de propulsion alternatifs. La technologie hybride est la plus répandue, surtout aux États-Unis. Le principe : en ville, un moteur électrique prend le relais du moteur thermique.
La Toyota Prius, pionnière sur ce créneau, ne dégage que 104 grammes de CO2 par kilomètre. Pour rattraper leur retard, les allemands BMW et Daimler et l’américain General Motors ont investi ensemble un milliard de dollars. La firme de Detroit a récemment dévoilé des versions hybrides du pick-up Chevrolet Silverado et du 4 × 4 Cadillac Escalade. Les Français sont plus sceptiques : «La tonne de CO2 évitée coûte 800 euros avec l’hybride, contre 300 euros pour un véhicule électrique», calcule Philippe Schulz, responsable de l’environnement chez Renault.
Les biocarburants, très répandus au Brésil, peinent à s’imposer en France. Moins de 2 000 véhicules «flex-fuel» roulent dans l’Hexagone avec un carburant à base de végétaux mélangés à de l’essence ou à du gazole. En cause, le faible nombre de pompes. Mais cette énergie, pourtant économe en CO2, fait aussi débat. Elle mobilise des terres cultivables et entraîne une utilisation massive d’engrais. Les constructeurs planchent donc sur des biocarburants nécessitant des surfaces agricoles moins étendues.
«Zéro gramme de CO2»
Les yeux rivés vers le futur, ils rêvent à des véhicules 100 % propres. «Nous pensons que dans des villes comme Paris ou Londres, les voitures seront interdites à moins qu’elles n’émettent zéro gramme de CO2», a déclaré Carlos Ghosn, le président de Renault et de Nissan au Salon de Tokyo. Avec ses batteries au lithium-ion, Nissan lancera en 2012 des véhicules électriques d’une autonomie comprise entre 300 et 400 kilomètres pour un temps de chargement de 30 minutes.
Reste à établir des partenariats avec les pouvoirs publics, notamment pour créer des bornes de recharge. Sur le même créneau, le groupe Bolloré prévoit de commercialiser en 2009 une BlueCar équipée d’une batterie lithium-métal polymère, capable de parcourir 250 kilomètres et d’atteindre 130 km/h. La Société des véhicules électriques (SVE, filiale du Groupe Dassault, propriétaire du Figaro) fournit une technologie qui équipe déjà une trentaine de Renault Kangoo, utilisées par EDF, La Poste ou Veolia. En jeu, un marché de 50 000 véhicules par an.
Encore plus compliquée à mettre au point : la propulsion à l’hydrogène, qui ne dégage que de l’eau. C’est la carte jouée par les allemands BMW et Daimler : ils annoncent des lancements entre 2010 et 2015. Première option, la pile à combustible qui transforme l’hydrogène en électricité. Le hic, son prix exorbitant : environ 160 000 euros. Autre problème, ce gaz se stocke à très haute pression ou à une température de – 253° C.
L’Europe va consacrer 470 millions, durant six ans, à cette technologie. «Mais il faudrait des milliards d’euros d’investissements pour stocker ce gaz dans des stations services», note Rémi Cornubert. Quant au moteur à hydrogène, il lui faut résoudre la question de l’extrême volatilité et de l’explosivité de ce gaz. Honda louera dès l’été 2008 aux Californiens une berline fonctionnant à l’hydrogène et disposant d’une autonomie de 400 kilomètres. Le prix : 600 dollars par mois pour trois ans. Dérisoire, pour qui aime la nature.