Le souci du développement durable doit être partagé par les PME. Patrick Widloecher, directeur du développement durable du groupe La Poste, souligne que c'est au final un véritable levier pour renforcer l'efficacité économique de l'entreprise.
Aujourd'hui, la plupart des entreprises du CAC 40 et les grandes entreprises publiques se sont dotées d'une direction du développement durable, et d'une stratégie et d'un plan d'actions afférents. Mais qu'en est-il des PME et PMI ? Que faire pour les convaincre d'entrer dans le mouvement du développement durable ? D'abord leur montrer que le développement durable est facteur de réduction des coûts. Lorsque l'on réduit ses consommations d'énergie ou de carburant pour diminuer le volume de ses émissions de CO2, on diminue aussi ses charges.
Le développement durable est par ailleurs très souvent facteur d'innovation, voire de modernisation des services, car son approche transverse nécessite une certaine pluridisciplinarité des acteurs. Parfois, il peut générer des recettes nouvelles comme avec les produits ISR pour les banques, la valorisation des déchets que l'entreprise a récupérés ou, maintenant, à travers les certificats d'économies d'énergie. Il aide à renforcer les liens de l'entreprise avec les territoires quand, par exemple, celle-ci signe un plan de déplacement d'entreprises avec la collectivité locale qui lui permet de diminuer, pour sa part, la circulation automobile en centre-ville, d'y améliorer l'air que l'on y respire et de mieux rentabiliser les transports en commun.
Le développement durable est aussi facteur de motivation pour les employés car, en tant que citoyens, ils veulent de plus en plus pouvoir prolonger au sein de leur entreprise les comportements éco-citoyens qu'ils ont adoptés dans leur vie personnelle. C'est encore plus vrai dans le secteur public, où développement durable et service public se construisent sur les mêmes notions de solidarité, d'intérêt général et de prévalence du long terme sur le court terme.
Facteur de cohésion au sein de l'entreprise parce qu'il nécessite de pratiquer régulièrement la solidarité (égalité homme-femme, gestion du handicap, personnes issues des quartiers sensibles, minorités visibles), le développement durable devient de plus en plus un atout concurrentiel pour celles qui le pratiquent avec rigueur et assiduité. Côté recrutement : les jeunes qui arrivent sur le marché sont de plus en plus responsables. A côté des questions de rémunération et de perspectives de carrière, ils souhaitent aujourd'hui travailler plutôt dans des entreprises qui respectent leur personnel, leurs clients et l'environnement.
Côté business ensuite. Après différents scandales qui les ont désagréablement surpris, comme les affaires Union Carbide à Bhopal, Enron ou autre Parmalat, les investisseurs y regardent à deux fois avant de placer leur argent dans une entreprise. Comme d'habitude, ils jaugent d'abord la santé financière de l'entreprise qui les intéresse. En second lieu, et c'est plus récent, ils examinent le niveau de son engagement en matière de responsabilité sociale, pour vérifier qu'ils n'ont pas affaire à une poubelle environnementale, à une bombe à retardement sociale ou à une entreprise qui ignore les fondamentaux de la bonne gouvernance.
De la même façon, les grandes entreprises, qui sont aussi les grands acheteurs, soucieuses de leur notation sociale, ajoutent de plus en plus souvent dans leurs cahiers des charges adressés à leurs fournisseurs et sous-traitant, des critères de responsabilité sociale. Une PME ou une PMI qui, dans son quotidien, fait fi de la responsabilité sociale risque ainsi d'être écartée au moment du choix.
Une raison de plus, si ce n'est la plus importante, pour se bâtir une image forte en matière de responsabilité sociale, aussi bien dans les domaines de l'environnement que dans ceux du social et du sociétal. Si l'on ajoute à tout cela que le développement durable permet aussi de mieux anticiper les risques, qu'ils soient d'image, juridiques, financiers ou boursiers pour les entreprises cotées, on voit que, pratiqué sans retenue, il est au final un véritable levier pour renforcer l'efficacité économique de l'entreprise.
Aux managers qui hésitent encore, voilà une série d'arguments qui peut leur faire prendre conscience que le développement durable pratiqué avec conviction va, au lieu d'alourdir leur charge de travail quotidienne, leur permettre d'atteindre plus vite et dans de meilleures conditions leurs objectifs économiques et professionnels.
Bref, le développement durable motive, rassemble, pérennise l'entreprise et crée de la valeur. Pour cela, il n'y a qu'un petit pas à franchir pour affirmer que, pour une entreprise, le développement durable, ce n'est que du bonheur ! Alors, pourquoi s'en priver ?
Patrick Widloecher, directeur du développement durable du groupe La Poste, administrateur du Comité 21