Après trois jours de discussions, le texte devra ensuite être examiné en avril par l'Assemblée.Avec l'examen en première lecture cet après-midi au Sénat du projet de loi sur les OGM, la guerre des pro et des anti, va de nouveau faire rage.
Depuis la présentation du texte en Conseil
des ministres à la mi-décembre, les amendements adoptés par la commission des
affaires économiques et sociales de la Haute Assemblée
«Une véritable provocation», dénoncent
sans hésiter les associations écologistes, de Greenpeace à France Nature
Environnement (FNE). «Nous voulons simplement être loyal, constructif et
prospectif », affirme Jean Bizet, sénateur UMP de la Manche
Le texte de loi vise à transcrire, en droit
français, la directive européenne permettant la coexistence des cultures. Il
insiste notamment sur les principes de «précaution, de prévention,
d'information et de responsabilité ».
Pour ce faire, il proposait la création d'une
haute autorité chargée d'évaluer les OGM, composée d'un comité scientifique et
d'un comité économique éthique et social, dont les avis devaient intervenir à
égalité et être résumés dans une synthèse. Un comité de préfiguration de cette
haute autorité s'est réuni en décembre, afin de rendre un avis sur le MON810
dont l'interprétation a conduit à l'activation de la clause de sauvegarde
auprès de Bruxelles et donné lieu à une vive polémique.
Dans ses amendements, le Sénat, qui rebaptise
la haute autorité en «haut conseil», propose donc de redonner du poids au
conseil scientifique, qui serait seul habilité à donner un avis, le comité
représentant la société civile émettant de simples recommandations. «On
accentue ainsi la scission entre scientifiques et non-scientifiques», dénonce
la fédération FNE.
L'amendement prévoyant que seules les
associations de consommateurs seraient susceptibles de saisir ce haut conseil,
est une autre source de crispation avec les ONG mais également avec le
ministère de l'Écologie. «Cette proposition n'est pas tolérable», assure-t-on
chez Jean-Louis Borloo. Un sous-amendement, déposé cette fois-ci par
Jean-François Le Grand, l'autre sénateur UMP de la Manche
Délit de fauchage
Si la proposition des sénateurs, d'un
meilleur étiquetage des semences OGM, est unanimement approuvée, celle de créer
un délit de fauchage rend perplexe bon nombre d'observateurs. «C'est du
donnant-donnant», explique Jean Bizet. Le texte de loi prévoyant l'inscription
dans un registre public de chaque parcelle cultivée avec des OGM, le délit de
fauchage (deux ans et 75 000 euros d'amendes) ou le délit de fauchage
aggravé (trois ans et 150 000 euros d'amendes lorsqu'il s'agit d'un
champ expérimental) «offre aux agriculteurs une sécurité supplémentaire»,
assure le rapporteur de la loi. «Le droit pénal n'est pas fait pour ça, c'est
purement électoraliste», s'énerve l'avocat Alexandre Faro, car « la loi permet
déjà de condamner les faucheurs. Il existe même un délit aggravé de
destruction en réunion pour lequel la peine va jusqu'à cinq ans de prison»,
rappelle-t-il.
Enfin, alors que le texte de loi initial
demandait aux agriculteurs cultivant des OGM, de s'assurer en cas de
contamination de champs voisins, les sénateurs proposent la création d'un fonds
privé qui serait piloté par les semenciers, ce qui, une fois encore, n'est pas
du goût des écologistes.
Les discussions qui doivent se poursuivre
jeudi et vendredi ne sont qu'un premier tour de piste. Le texte doit être
examiné en avril par les députés, lorsque l'Assemblée reprendra ses travaux
après la pause des municipales.
Qu'il s'agisse des sénateurs
ou des députés, la volonté à peine cachée, est de reprendre la main sur ces
dossiers environnementaux alors qu'ils se sont sentis exclus des discussions du
«Grenelle de l'environnement». Mais ils devront tenir compte de l'opinion
publique : deux sondages récents rappellent sans aucune ambiguïté la
grande méfiance des Français à l'égard des OGM. Une constante depuis des
années.
Marielle
Court