Le Japon et la Corée du Sud ont suspendu l'importation du fromage après la découverte de taux de dioxine supérieurs aux normes dans le lait de certains élevages de la région de Naples. La Commission européenne menace également de stopper l'importation de cette spécialité italienne si elle ne lui fournit pas, avant 18 heures, des informations sur la contamination. Source : LE MONDE
Rome tente de relativiser l'affaire de la mozzarella contaminée
Les amateurs japonais et sud-coréens de mozzarella devront se faire une raison. Leurs deux pays viennent de suspendre, de façon "préventive" et dans l'attente de vérifications, les importations du fromage italien. A l'origine de cette décision : la découverte que le lait de bufflonne de certains élevages de la région de Naples, la Campanie, d'où provient la plus grande partie de la mozzarella di bufala, présente un taux de dioxine supérieur aux normes européennes.
Bruxelles menace l'Italie d'un embargo
La Commission européenne a mis en demeure les autorités italiennes de lui fournir, jeudi, avant 18 heures, des informations sur la contamination de lots de mozzarella, sans quoi cette spécialité italienne pourrait être frappée d'embargo. "Si nous n'avons pas de réponse, la Commission envisagera des mesures de sauvegarde", a expliqué une porte-parole de la Commission. Parmi ces mesures, figure la possibilité d'un embargo, a-t-elle indiqué, sans préciser exactement quelles sortes de mozzarella seraient alors touchées.
"La Commission demande le retrait immédiat des produits contaminés du marché, communication des noms des élevages de bufflonnes mis sous séquestre, la liste des produits contaminés, des informations sur les mesures de contrôle mises en oeuvre et des garanties sur les mesures de prévention", a-t-elle ajouté. -
La Russie a fait savoir qu'elle procédait à des contrôles des produits fromagers en provenance de la Campanie, les Etats-Unis et la Grande-Bretagne s'interrogent sur d'éventuelles mesures. Les autorités italiennes craignent que se répande une psychose de la "mozzarella à la dioxine", effet collatéral de la crise des déchets qui sévit dans la région de Naples. Une réunion de crise s'est tenue, mercredi 26 mars, au ministère de la santé, et des informations ont été fournies à l'Union européenne (UE), qui en réclamait d'urgence.
Selon un communiqué du ministère, une "présence de dioxine modérément supérieure à la norme" a été effectivement détectée chez vingt-cinq producteurs de mozzarella, sur les 130 soumis à des contrôles en février. Les installations en question ont été immédiatement mises sous séquestre, tout comme les 83 élevages qui fournissaient le lait incriminé.
Le problème serait donc "circonscrit" et "limité", selon les autorités. "Le taux de dioxine détecté est de très peu supérieur à celui toléré", a affirmé le secrétaire d'Etat à la santé. Il serait de l'ordre de 3,2 à 3,3 picogrammes par gramme de lait – un picogramme vaut 10-12 gramme –, alors que le seuil fixé par l'UE est de 3 picogrammes.
Les experts cités par la presse italienne ne semblent pas s'inquiéter outre-mesure. Selon La Repubblica, il faudrait "consommer quotidiennement environ 1 300 kg de cette "mozzarella incriminée" pendant quinze jours pour mettre en danger sa santé".
Pour les autorités italiennes, la proportion qu'a prise l'affaire est "excessive" et "injustifiée". Elles affirment que le rapport entre la crise des déchets qui se poursuit en Campanie et la contamination du lait par la dioxine reste à établir.
La Camorra, la mafia napolitaine, qui contrôle le secteur des ordures dans la région, a pourtant bien enseveli pendant des années des déchets toxiques industriels dans le sous-sol.
Les images de tas d'ordures amoncelés en bordure des pâturages ou brûlant en dégageant des fumées noires avaient déjà passablement inquiété les consommateurs. Depuis deux mois, les ventes de mozzarella en Italie avaient chuté de 30%. Après l'annonce de la présence de dioxine, la dégringolade atteint 60 %. C'est au tour maintenant des exportations d'être touchées. Elles représentent 48 millions d'euros, soit 16 % du chiffre d'affaires des producteurs.
LE MONDE | 27.03.08
Salvatore Aloïse