Un superministère de l'Environnement devrait être créé à l'occasion du Congrès du peuple. Premier pollueur de la planète, la Chine veut montrer qu'elle est prête à prendre la question au sérieux en créant un ministère entièrement dédié à l'environnement. Il fera partie de ce que la presse chinoise a déjà surnommé les «superministères», créés à l'occasion de la tenue du Congrès national du peuple, session annuelle du Parlement réunis pour deux semaines à Pékin.
Qualifiée de «cruciale» par Hua Jianmin, secrétaire général du Conseil d'État, équivalent du gouvernement, la protection de l'environnement est devenue une priorité pour le Parti, qui craint de voir la dégradation de l'air et de l'eau chinois perturber sérieusement la constitution d'une «société harmonieuse», si chère au président Hu Jintao et à son premier ministre, Wen Jiabao.
La State Environmental Protection Administration (Sepa), embryon du nouveau ministère qui existe depuis plusieurs années déjà, a multiplié les projets ces derniers mois avec la bénédiction d'autres organes clés du Parti, comme la China Banking Regulatory Commission (CBRC).
Intérêts divergents
Les «crédits verts», pénalisant les entreprises polluantes qui veulent emprunter de l'argent, ont ainsi été instaurés il y a plusieurs mois. En février, un «système d'assurance verte» prévoyant des dommages et intérêts pour les victimes d'accidents écologiques, était lancé. Bilan des velléités de l'administration en matière de contraintes environnementales : près de 400 millions d'euros de prêt, demandés par des entreprises jugées polluantes, ont été rappelés par les établissements bancaires ; cent huit accidents écologiques graves ont été recensés par la Sepa en 2007 et trente-sept compagnies, qui voulaient être cotées en Bourse, ont d'abord été passées au crible.
Mais les obstacles restent nombreux sur le terrain. Pan Yue, directeur adjoint de la Sepa, réputé pour son franc-parler, reconnaît les difficultés rencontrées par exemple dans l'instauration des «crédits verts». «Certaines provinces et certaines institutions financières ne les ont pas appliqués et les politiques des gouvernements locaux protègent des industries hautement polluantes», estimait le dirigeant le mois dernier.
Les réticences provinciales ne sont pas les seules à entraver la marche des écologistes chinois. Le nouveau superministère devra aussi faire face aux intérêts divergents de son pendant créé pour l'Industrie, ainsi que du nouveau Bureau national de l'énergie. La Chine reste avant tout une belle machine de croissance, que beaucoup de responsables du Parti ne veulent pas voir s'enrayer. Dans son plan quinquennal 2006-2010, Pékin prévoit de réduire sa consommation d'énergie de 20 % par point de croissance. Xie Zhenhua, vice-président de la National Development and Reform Commission (NDRC), organe clé de la mise en place des réformes, reconnaissait en marge du Congrès national du peuple que les objectifs n'étaient aujourd'hui pas atteints.
Shanghaï, Julie Desné