L'Union européenne s'est engagée à parvenir avant la fin de 2008 à un accord sur une réduction de 20% de ses émissions polluantes. Les Etats-Unis se disent prêts à accepter des objectifs moins contraignants pour les pays émergents.
L'Union européenne est convaincue que sa crédibilité en matière de lutte contre le réchauffement climatique est liée au fait qu'elle soit exemplaire sur le sujet. Elle s'est donc engagée aujourd'hui à parvenir avant la fin de l'année 2008 à un accord entre ses 27 Etats membres, sur une réduction de 20% de ses émissions polluantes (essentiellement de CO2, le principal gaz à effet de serre) d'ici à 2020. Un engagement qui calcule-t-elle, lui permettra de prendre la main dans les négociations internationales qui doivent décider des suites à donner, à partir de 2012, au protocole de Kyoto.
Les ministres de l'Energie des Vingt-Sept, qui se sont tous déclarés en faveur des propositions présentées par la Commission européenne, ont toutefois émis de nombreuses revendications qui présagent d'une négociation difficile.
"Il se dégage un soutien pour une adoption rapide de ce paquet", a déclaré le ministre slovène de l'Energie, Andrej Vizjak, dont le pays préside actuellement l'Union. "Il y a une chance de parvenir à un accord politique pendant la présidence française (de l'UE, au second semestre de 2008)", a renchéri le commissaire européen à l'Energie, Andris Piebalgs, tout en admettant qu'il y avait "des boulons à serrer".
Si les Vingt-Sept veulent aller vite en besogne, c'est afin d'être en position de force pour aborder en 2009 la négociation internationale qui s'ouvrira sur l'après-protocole de Kyoto. Les efforts prévus par ce protocole, qui expire en 2012 et que les Etats-Unis n'ont pas signé, doivent être redoublés et l'Union européenne entend clairement donner l'exemple. Il s'agit de concrétiser l'objectif d'une réduction de 20% des gaz à effet de serre par rapport à 1990, voire 30% en cas d'accord international, en imposant de nouvelles contraintes aux industries, en produisant au moins 20% d'énergies renouvelables en 2020 et en utilisant 10% de biocarburants dans le total.
Les ministres, qui "co-décideront" sur ce dossier avec le Parlement européen, ont reconnu que ces mesures auront un coût estimé à 0,5% du PIB de l'UE en 2020, soit 60 milliards d'euros, et que le prix de l'électricité augmenterait de 10 à 15%.
Mais cela ne représentera que trois euros par semaine et par citoyen européen et il faut comparer ces chiffres au coût de l'inaction estimé par les experts internationaux à 20% du PIB dans le pire des cas et à 5% du PIB dans le meilleur.
Certaines modalités des propositions font toutefois débat. "Nous sommes dans un contexte de guerre énergétique", a ainsi déclaré le ministre français de l'Ecologie et du Développement durable, Jean-Louis Borloo, estimant que "nos instruments sont inférieurs à nos ambitions". Ainsi, la Commission a d'abord proposé un mécanisme européen, et non plus national, d'échange de permis de polluer qui se basera sur les secteurs industriels afin d'éviter les distorsions de concurrence et qui prévoira qu'à terme toutes les industries, afin de les responsabiliser, devront acheter aux enchères 100% de leur quotas de CO2.
Toutefois certains secteurs avides d'énergie, comme l'acier ou les raffineries, disposeront d'un mécanisme différent, aujourd'hui non défini.
Par ailleurs, la Commission a reporté à 2011 la possibilité, demandée notamment par la France, de taxer les importations en provenance de pays qui ne respectent pas les mêmes normes. Le principe d'une taxe carbone sur les importations de pays ne faisant pas ou faisant peu d'efforts pour réduire leurs émissions de gaz à effet de serre avait été fortement défendu par Nicolas Sarkozy pendant sa campagne présidentielle.
Certains pays européens se demandent par ailleurs comment ils vont respecter l'objectif européen d'utiliser au moins 20% d'énergies renouvelables provenant de sources comme l'éolien, le solaire ou la biomasse, contre 8,5% aujourd'hui. Cet objectif est décliné selon les pays. "Il faut des dispositions particulières pour les petits Etats insulaires", a ainsi plaidé le représentant chypriote.
Pour contourner l'obstacle, l'idée à été avancée d'autoriser ces pays à acheter des certificats d'énergie renouvelable produite ailleurs. Mais ce système suscite des divergences entre les Vingt-Sept. Si le petit Luxembourg, qui n'a aucune chance d'arriver à produire sur son territoire 20% d'énergies renouvelables, en fait une "condition sine qua non" de son accord et refuse toute limitation sur ces transferts, l'Allemagne de son côté veut pouvoir garder chez elle son énergie renouvelable subventionnée.
Enfin, l'objectif d'utiliser 10% de biocarburants dans le total des carburants fait lui aussi l'objet d'un débat dans la mesure où le bilan énergétique et écologique de ces produits est contesté par les scientifiques.
Le même jour les Etats-Unis ont fait savoir qu'ils étaient prêts à accepter que les pays émergents puissent se voir fixer des objectifs contraignants de réduction de gaz à effet de serre différents de ceux des pays industrialisés, dans le cadre d'un accord international, a indiqué un haut responsable américain. "Nous voulons que ces engagements (des pays émergents) soient aussi contraignants que ce que l'on pourrait attendre de nos engagements.
Quant aux chiffres, aux pourcentages de réduction (des gaz à effet de serre, ndlr) ils n'ont pas à être identiques. Cela fera l'objet de négociation", a déclaré l'ambassadeur américain auprès de l'Union européenne, Boyden Gray. Le responsable américain, qui s'exprimait lors d'un colloque organisé par le centre de réflexion European Policy Center, a confirmé par ses propos l'assouplissement de l'attitude du gouvernement Bush sur les questions climatiques. Bien que fortement sollicités par la communauté internationale et particulièrement par l'UE, le président Georges W.Bush a toujours refusé de ratifier le protocole de Kyoto.
latribune.fr
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