A peine testés, les futurs compteurs d'électricité "intelligents" Linky suscitent déjà la polémique sur le coût de leur éventuelle généralisation, qui pourrait atteindre plus de 8 milliards d'euros à la charge des usagers. Imposés par une directive européenne qui prévoit leur installation chez 80% des consommateurs d'ici 2020, ces compteurs doivent faciliter la mise en place de tarifs différenciés en fonction de la consommation, améliorer la concurrence et favoriser des économies d'énergie.
Dans Le Parisien du mardi 8 juin, la Fédération nationale des collectivités concédantes et régies (FNCCR) estime leur coût entre 8 et 9 milliards d'euros, à la charge des usagers via le Tarif d'utilisation des réseaux publics d'électricité (Turpe). Ce coût "intègre la fourniture et la pose des compteurs, la fourniture des concentrateurs chargés de collecter les données de chacun des compteurs pour les réémettre vers le système de gestion et d'exploitation d'ErDF et la création des systèmes informatiques de gestion et d'exploitation des données", explique à l'AFP Jean-Luc Dupont, un de ses dirigeants.
Il est surtout beaucoup plus élevé que le montant de 4 à 5 milliards d'euros jusqu'ici avancé par ErDF. Mardi, cette filiale d'EDF qui gère les réseaux basse et moyenne tension a revu ses estimations. Le montant d'une éventuelle généralisation du système pourrait atteindre 120 à 240 euros par usager, soit un total de 4,2 à 8,4 mds d'euros pour le changement des 35 millions de compteurs.
Mais pour ErDF, le coût de la généralisation du système reste pour l'usager "très inférieur aux gains générés par les économies d'énergie", qui pourraient atteindre 50 euros par an pour une facture annuelle de 400 euros. En outre, le système n'en est qu'à une phase d'"expérimentation", lancée en mars, rappelle François Blanc, responsable du projet Linky chez ErDF. Quelque 30.000 compteurs ont déjà été installés dans les régions de Tours et de Lyon, 70.000 autres devraient l'être d'ici fin juin et 300.000 d'ici fin 2011, selon ErDF. "Au terme de cette expérimentation, nous ferons un retour d'expérience qui permettra à la Commission de régulation de l'énergie et aux pouvoirs publics de prendre une décision de généralisation, mais aussi de préciser ses modalités, y compris financières", indique M. Blanc
Interrogé mardi sur cette polémique, le ministre de l'Energie Jean-Louis Borloo a également souligné qu'il s'agissait d'une expérimentation. Et jugé qu'il n'y avait "rien de déraisonnable" à ce que le coût de l'installation soit supporté par les usagers, ceux-ci profitant ensuite des économies engendrées.
"On avait annoncé que ça coûterait dix milliards d'euros, on y arrive", estime pour sa part Pierre Bivas, PDG de Voltalis, PME spécialisée dans des systèmes de gestion à distance de l'électricité. Il faudrait plutôt "un système ciblé et actif au lieu de quelque chose de passif et généralisé", juge-t-il, rappelant que les économies d'énergie ne se font pas "au niveau du compteur", qui ne permet pas en lui-même d'agir sur la consommation.
Là où ils ont été installés, les compteurs pâtiraient en outre de dysfonctionnements, selon Le Parisien. "Nous n'avons pas de retour sur un dysfonctionnement avéré", assure M. Blanc. Parfois, "le client bénéficiait d'un réglage de son disjoncteur supérieur à la puissance prévue dans son contrat", explique-t-il. "L'installation du nouveau compteur peut donc faire disjoncter l'installation". La solution consiste dès lors à opter pour un contrat supérieur, au prix toutefois d'un surcoût