Par Dan Vogel, Président et co-fondateur d’Enablon, éditeur français de logiciels destinés à aider les entreprises à réduire leurs émissions de CO2 et autres polluants, les accidents du travail et à gérer et piloter les risques juridiques, sociaux et financiers associés à leur développement.
Le développement durable ne peut être traité indépendamment du développement économique; en ce sens, la création d’un ministère d’Etat chargé de l'écologie, du développement et de l'aménagement durable, est une avancée majeure.
AU XVIIIème siècle, Adam Smith, père du libéralisme économique, faisait conduire l’homme « qui ne pense qu’à son propre gain », par une « main invisible ». « Tout en ne cherchant que son intérêt personnel […] il travaille [… ] pour l’intérêt de la société [1]». Plus de 200 ans plus tard, le libéralisme a démontré son efficacité à créer de la richesse.
Mais il doit aujourd’hui faire face aux limites de ressources naturelles longtemps considérées comme infinies. Aujourd’hui, le développement durable est la seule approche véritablement capable d’assurer et de généraliser notre niveau de vie actuel sans mettre en péril notre planète ni l’avenir de nos enfants.
Le développement durable apporte au libéralisme, responsabilité et pérennité. Un mouvement de tous les acteurs économiques est en cours pour que le développement durable joue ainsi le rôle d’une seconde « main invisible », qui guidera vertueusement le comportement des acteurs économiques.
Le développement durable profitable à l’industrie, profitable à l’investissement
Le développement durable vise avant tout au développement de notre monde. Il est favorablement accueilli par les consommateurs qui encouragent les entreprises et approuvent le commerce équitable. Ainsi, le chiffre d’affaires du commerce équitable en France a quintuplé en 5 ans. Les investisseurs croient aussi dans le développement durable ; les fonds dédiés à l’investissement socialement responsable en Europe, représentent aujourd’hui 10 à 15% des encours. Les encours en France on presque doublé de 2003 à 2006 pour dépasser 8 milliards d’euros…
L’efficience, clef du développement moderne
Les ressources sont rares et l’entreprise doit maximiser ses performances tout en faisant preuve d’économie ; l’entreprise doit les utiliser avec efficience. Enablon, société que je dirige, aide les grands groupes à mesurer en permanence leur efficience et celle de leurs fournisseurs en matière environnementale et sociale. Le suivi d’indicateurs non financiers contribue, par exemple, à minimiser les émissions de CO2 et autres polluants et à augmenter le recyclage des déchets tout en produisant mieux. Mais au-delà de résultats économiques, écologiques et sociaux certains, la mise en œuvre des règles du développement durable sont autant d’atouts pour séduire et fidéliser des consommateurs et collaborateurs soucieux du respect de l’homme et de son environnement. En ce sens, le développement durable est également un axe de développement commercial.
Acteur et régulateur
Si le libéralisme économique a démontré sa capacité unique à créer de la richesse, il génère aussi de dangereux déséquilibres. Il est de plus en plus difficile pour l’Etat de maintenir l’équilibre alors que l’interventionnisme économique est de plus en plus limité. C’est pourquoi de plus en plus d’associations, de consommateurs, d’investisseurs, d’analystes … bref les parties prenantes de l’entreprise se substituent à un état régulateur pour exercer une forte pression sur l’entreprise dans les domaines environnementaux et sociaux. Celle-ci est donc encouragée, voire obligée, à se comporter de manière responsable non seulement vis-à-vis de la communauté financière mais aussi envers l’homme et son environnement.
Une réputation à 16 milliards de $
Sous la pression de l’opinion publique et du bon sens économique, de plus en plus de responsables d’entreprises s’engagent sur la voie du développement durable et affichent fièrement réalisations et résultats. Et cet engagement rapporte. Selon les résultats d’une étude du cabinet américain CCW, la capitalisation boursière de Wal-Mart pourrait gagner 8,4%, soit 16 milliards de $, si la société avait la même réputation que son concurrent Target Corp. Face à un tel constat, il est difficile de nier la portée, l’impact et le rôle du développement durable qui devient un élément indispensable et régulateur de l’économie libérale.
En se généralisant, la prise de conscience en faveur du développement durable, du respect intelligent de l’environnement et de l’efficience économique devrait à terme placer les entreprises devant leurs responsabilités face à leurs clients, partenaires, employés et actionnaires. Responsables et comme guidés par une nouvelle « main invisible » durablement vertueuse tous les acteurs économiques participeront ainsi à l’autorégulation nécessaire à la poursuite de notre développement et de notre croissance. Mais le temps presse il est donc nécessaire d’encourager toutes les actions favorisant cette indispensable prise de conscience.