L'enquête révèle un écart important entre les besoins des dirigeants d'entreprise en matière de gestion des enjeux humains et les responsabilités et capacités perçues des services des RH
Selon les résultats d'une récente enquête réalisée par Deloitte et l'Economist Intelligence Unit, bien que les enjeux reliés au capital humain soient à l'ordre du jour de bon nombre d'entreprises au Canada et partout dans le monde, le fossé continue de s'élargir entre les besoins des dirigeants des entreprises et la capacité des RH d'y répondre.
L'étude Aligned at the Top, menée auprès de 531 cadres supérieurs et chefs de service des RH à l'échelle internationale (5 % d'entre eux étant canadiens), montre que plus de 85 % des répondants croient que les enjeux humains ont un impact important sur tous les aspects de la performance organisationnelle. Ce taux passe à 90 % lorsque cette dernière est projetée trois à cinq ans dans le futur. De toute évidence, les entreprises continuent d'éprouver des difficultés à tisser des liens efficaces avec les RH afin de faire face aux enjeux liés au capital humain.
Même si les dirigeants perçoivent les enjeux de capital humain comme importants sur le plan stratégique, ils ne sont pas convaincus que les services des RH sont prêts à relever le défi. Seuls 23 % croient que les RH jouent un rôle essentiel dans la formulation de stratégies et la réussite opérationnelle. Seuls 3 % des participants décrivent leur entreprise comme un chef de file en gestion des employés et en RH, alors que près de la moitié (46 %) qualifient leurs capacités d'adéquates et admettent qu'elles pourraient être améliorées. Qui plus est, 52 % des entreprises interrogées avouent n'avoir à leur emploi aucun cadre supérieur en RH ou autre dirigeant responsable spécifiquement des enjeux liés au capital humain; 68 % prévoient pourvoir ce poste d'ici trois à cinq ans.
"Au cours de la dernière décennie, l'avènement des RH comme partenaire d'affaires stratégique au sein des entreprises a fait couler beaucoup d'encre", affirme Suzanne Morin, associée du groupe Capital humain chez Deloitte. "Mais les RH continuent d'être perçues comme un centre de coûts ou une simple fonction administrative. D'après notre expérience, les RH et les enjeux de capital humain sont deux sujets bien distincts dans le marché canadien. Quand les dirigeants d'entreprise parlent des RH, ils parlent surtout d'avantages sociaux, d'évaluation du rendement et d'efficacité opérationnelle. Mais lorsqu'ils discutent des enjeux de capital humain, ces mêmes dirigeants d'entreprise se concentrent sur les défis stratégiques comme la gestion des talents, la productivité des effectifs et le développement du leadership; dans bien des cas, la fonction RH n'est même pas mentionnée."
Les enjeux stratégiques de capital humain sont avant tout des enjeux d'affaires nécessitant une profonde connaissance du milieu des affaires. Inversement, les activités de RH ont traditionnellement été d'ordre administratif, nécessitant ainsi une bonne compréhension des politiques et procédures en la matière. D'après les résultats de l'enquête, même si la plupart des services des RH semblent bien maîtriser l'aspect administratif de leur fonction, l'aspect stratégique affiche des lacunes, ce qui représente un défi autant pour les dirigeants d'entreprise que pour ceux des RH. Selon les dirigeants ne faisant pas partie d'un service des RH, la direction est encore réticente à consulter les RH pour des enjeux de capital humain stratégiques. Réciproquement, les dirigeants des RH ne consultent pas la direction à propos des enjeux de capital humain clés. Par exemple, la direction consulte rarement ou même jamais les dirigeants des RH concernant des fusions ou des acquisitions (63 %), et seulement 41 % des dirigeants en RH consultent la direction sur les questions d'impartition.
L'enquête montre toutefois que les dirigeants d'entreprise et des RH sont confiants que le rôle des RH évoluera. La grande majorité (82 %) des répondants prévoient qu'au cours des trois à cinq prochaines années, les RH ne seront plus perçues comme un simple centre de coûts, mais plutôt comme une fonction stratégique à valeur ajoutée. L'enquête révèle en outre que les services des RH réalisent l'importance de devenir plus stratégique et, en conséquence, délèguent de plus en plus la responsabilité des transactions administratives et autres activités non stratégiques à l'externe. En moyenne, 25 % des répondants impartissent déjà le recrutement, la formation et la paie à l'extérieur de leur entreprise, alors que 15 % prévoient impartir ces activités et d'autres activités RH au cours des trois à cinq prochaines années.
"La capacité des entreprises à aborder les enjeux humains est essentielle à la réussite à long terme, voire dans certains cas à la survie d'une entreprise. En fait, il ne suffit pas de donner aux RH un siège à la table du comité de direction stratégique. En fait, l'important est de s'assurer de ne négliger aucune des questions qui touchent aux personnes, et qu'aussi bien les dirigeants d'entreprise que les RH puissent avoir droit de parole à ce chapitre, conclut Suzanne Morin. Au départ, il faut s'assurer que les RH acquièrent les compétences d'affaires nécessaires pour analyser les défis humains et élaborer les solutions. Les dirigeants d'entreprise doivent ensuite découvrir comment arrimer les RH et les affaires afin de former un noyau stratégique en mesure de s'attaquer à ces enjeux."
Méthodologie
Deloitte et l'Economist Intelligence Unit ont collaboré à cette enquête. Environ 531 cadres supérieurs et chefs de service des RH représentant des entreprises partout dans le monde ont participé à l'enquête. Les données ont été colligées à partir de 481 questionnaires écrits et de 50 entrevues avec des dirigeants. L'analyse des points de vue comparatifs des chefs de service des RH et des cadres supérieurs est fondée sur les réponses de 259 participants, y compris 104 "responsables de la fonction RH" (40 %) et 155 "cadres supérieurs au sein d'une autre fonction que les RH" (60 %). Les participants représentaient chaque grande région du globe et chacun des principaux secteurs d'activités, et le chiffre d'affaires des entreprises allait de moins de 125 millions $ à plus de 10 milliards $.