Principe de réalité contre principe de précaution
Les 27 ministres de l’agriculture de l’Union européenne ont conclu un accord, mardi 12 juin, pour un nouveau règlement sur les productions biologiques. Une concession est faite aux OGM. A partir de 2009, des dérogations seront possibles pour utiliser des pesticides de synthèse et des intrants issus d’OGM, pour les cas où des équivalents non transgéniques n’existeraient pas.
Le Conseil européen a aussi décidé d’appliquer un seuil de tolérance pour la contamination accidentelle des produits bio par des OGM. Ce seuil est fixé à 0,9% d’un produit, comme pour l’agriculture conventionnelle.
Les parlementaires de l’Union avaient largement refusé toute trace d’OGM dans l’agriculture bio (611 voix contre, 61 voix pour). Mais cette vision idéale de l’agriculture biologique - soutenue par les voix démocratiques de l'Europe - ne résiste pas à l’épreuve des faits. Comme chacun sait, les oganismes génétiquement modifiés «voyagent» partout. Il est impossible de garantir un produit agricole 100% sans traces génétiquement modifiées. D’où la décision pragmatique du conseil européen. On peut la contester mais elle est "raisonnable".
En réalité, l’Europe fait ce qu'elle peut pour lutter contre les OGM en agriculture. La Roumanie
, qui avait misé sur le soja génétiquement modifié pour doper une économie toujours très agricole, a été obligée de revoir sa politique depuis son intégration dans l’UE. Le gouvernement roumain, avec l’aide de l’Europe, accorde aujourd’hui des compensations financières (250 € / ha) aux producteurs de soja pour qu’ils abandonnent les cultures OGM et se reconvertissent. Environ 200 000 ha
de cultures sont concernées en Roumanie. Mais la « pollution » OGM entraînée par ces parcelles est réelle.
Les OGM agricoles posent un problème d’environnement mondial. Face à ce problème, l’Europe ne peut pas se permettre la désunion. Mais la réalité, c’est que la firme américaine Monsanto, qui a notamment vendu aux Roumains des semences de soja OGM, a obligé l’Europe à accepter une pollution de fait.
Sans un gouvernement européen fort, sans une politique économique européenne capable de peser face aux Etats-Unis d'Amérique, comment imaginer des garde-fous contre des politiques commerciales agressives à l'égard d'une agriculture préservée ? Un traité européen simplifié, tel que le souhaite le président français Nicolas Sarkozy, sera-t-il suffisant pour prendre les bonnes décisions dans ce domaine ?
En attendant, là où Monsanto a testé ses semences et ses pesticides, les agriculteurs Bio « contaminés » sont condamnés à disparaître.
La Roumanie
200 000 ha