Des centaines de partisans du Fatah palestinien ont fui samedi par terre ou par mer la bande de Gaza, entièrement contrôlée par les islamistes du Hamas qui, de leur côté, menaçaient de porter en Cisjordanie leur combat contre les forces fidèles au président Mahmoud Abbas.
Abbas qui dirige le Fatah, compte investir dimanche un nouveau gouvernement dont la mise en place entraînera la levée de l'embargo occidental sur l'aide financière directe aux Palestiniens. Le Premier ministre désigné, Salam Fayyad, a jeté son dévolu sur 14 ministres, indiquent des responsables.
Vendredi, Abbas avait dissous le gouvernement d'union nationale formé avec le Hamas après que le mouvement islamiste eut pris le contrôle de la bande de Gaza aux dépens du Fatah.
Un responsable du Hamas, Sami Abou Zouhri, a déclaré que 150 partisans de son mouvement avaient été "enlevés" en Cisjordanie en réaction aux événements de Gaza et il a parlé à ce sujet de "véritable terrorisme".
"Nous ne resterons pas les bras croisés face à ces crimes en Cisjordanie. Nous prendrons toutes les mesures nécessaires pour parvenir à un arrêt de tels crimes", a-t-il dit.
Le consul général des Etats-Unis chargé des relations avec les Palestiniens, Jacob Walles, a déclaré à Reuters à Ramallah que Washington lèverait son embargo sur l'aide directe une fois formé le cabinet de crise annoncé, ce qui ouvrira la voie à des mesures analogues de l'Union européenne et d'Israël.
"Il n'y aura aucun obstacle d'ordre économique et politique", a-t-il dit après avoir rencontré Abbas. "(Ce gouvernement) aura un soutien total."
Fayyad, ex-ministre des Finances, a mis au point la composition du nouveau gouvernement et doit le présenter dimanche, a déclaré Yasser Abed Rabbo, collaborateur d'Abbas.
Le Quartet des médiateurs pour le conflit du Proche-Orient (Union européenne, Russie, Etats-Unis et Russie) a exprimé son soutien au président Abbas et fait part de ses inquiétudes quant à la situation à Gaza sur le plan humanitaire. Mais il n'a pas précisé s'il allait lever son embargo sur l'aide directe, imposé l'an dernier après l'arrivée du Hamas au pouvoir.
Gaza et la Cisjordanie se trouvent à 45 km l'une de l'autre, séparées par Israël, mais les deux territoires semblent en passe de s'administrer séparément. "Au stade actuel, malheureusement, Gaza échappe au contrôle de l'Autorité palestinienne", a déclaré Saëb Erekat, conseiller d'Abbas.
Haniyeh, qui affirme rester Premier ministre, a déclaré au Figaro qu'il excluait de créer un Etat palestinien séparé dans Gaza, bande côtière de 40 km où vivent 1,5 million de Palestiniens. "La séparation n'est pas à l'ordre du jour et ne le sera jamais", a-t-il dit.
INCIDENTS A RAMALLAH
L'embargo occidental a été imposé parce que le mouvement islamiste refusait de reconnaître Israël, de renoncer à la violence et d'accepter les traités de paix intérimaires.
Le Hamas a établi des points de contrôle à Gaza pour tenter d'empêcher de hauts représentants du Fatah de quitter l'enclave.
Israël et l'Egypte ont autorisé des centaines de partisans du Fatah à gagner la Cisjordanie, a-t-on rapporté de source palestinienne. Un porte-parole de Tsahal a dit qu'Israël laissait des Palestiniens quitter Gaza pour la Cisjordanie en examinant leurs cas individuellement.
"Je ne vivrai pas dans un Etat gouverné par le Hamas", déclarait Chadi, combattant du Fatah, après avoir fui Gaza pour la Cisjordanie occupée en franchissant un contrôle israélien.
A Ramallah, une cinquantaine d'hommes du Fatah et 200 autres manifestants ont pris d'assaut un bâtiment parlementaire et en ont fait sortir de force le vice-président de l'assemblée, ont rapporté des témoins en précisant qu'il n'avait pas été blessé.
A Hébron, autre ville de Cisjordanie, des membres des Brigades des martyrs d'Al Aksa, émanation du Fatah, ont pris le contrôle de locaux officiels et mis en place des barrages pour rechercher des éléments du Hamas.
A Gaza, de nombreux partisans du Fatah craignent des représailles du mouvement islamiste. "On nous a anéantis (...) Je me sens perdu", confiait Oumm Rami, dont le mari est colonel dans les Forces de sécurité nationales dominées par le Fatah.
Le chef de la police palestinienne Kamal el Cheikh, établi en Cisjordanie, a ordonné à ses hommes déployés à Gaza de ne pas appliquer les instructions du Hamas. Haniyeh a réagi en créant au-dessus de lui un "commandement de police supérieur".