La CITES (Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d'extinction) doit concilier impératifs économiques et urgences écologiques . Les signataires de cette convention se sont réunis à La Haye, du 3 au 15 juin 2007, pour lister de nouvelles espèces menacées. Encore faut-il faire respecter par les Etats les mesures de protection décidées dans cette assemblée.
Au moment où l'érosion de la biodiversité est telle que les scientifiques parlent de la sixième grande crise d'extinction des espèces depuis le début de la vie sur terre il y a 3,8 milliards d'années, la 14ème Conférence des Parties (CdP) qui s'est tenue du 3 au 15 juin à La Haye
(Pays-Bas) représente une tentative d'importance majeure pour enrayer ce processus.
En effet, la CITES
, créée en 1975 à Washington est une convention du PNUE (Programme des Nations-Unies pour l'environnement) qui a pour objet de protéger les espèces sauvages d'une surexploitation commerciale. Déjà près de 33 000 espèces (5 000 animales et 28 000 végétales) sont répertoriées par la Convention
dans une de ces trois annexes et bénéficient d'un système de protection, adapté au degré de menaces qui pèse sur elles.
Exprimant les préoccupations internationales croissantes, la plupart des quelques 40 propositions sur lesquelles la Conférence
devait statuer concernait majoritairement les espèces marines et forestières mises à mal par la surpêche et l’exploitation excessive des forêts. Cette année, les débats avaient un enjeu économique prépondérant si on considère que selon l'Organisation des Nations-Unies pour l'Alimentation et l'Agriculture (FAO), le commerce mondial des produits forestiers est estimé à 168 milliards USD (126 milliards d'euros) et que la valeur du commerce international des produits de la pêche a atteint récemment un chiffre record de 71 milliards USD (53 milliards d'euros). Le poids de ce marché devait conduire la CITES
à statuer pour que les décisions adoptées soient respectées et à mettre en place une stratégie cohérente sur une période allant de 2008 à 2013.
A l'heure du bilan, l'inscription aux annexes de nouvelles espèces ou leur requalification semble avoir, pour bonne part, répondu aux attentes des organisations de défense de la nature, bien qu'elles déplorent que certaines autres espèces, pourtant fortement menacées, n'aient pas pu, elles aussi, bénéficier d'une telle protection. «Globalement, la conférence a été un succès, avec quelques décisions-clés sur les anguilles, les poissons-scies, les éléphants et les tigres, mais c'est un sujet de grande inquiétude que des pays aient manqué l'opportunité d'aider à la conservation de plusieurs espèces commercialisées » a estimé Susan Lieberman, directrice du programme des espèces au Fonds mondial pour la nature (WWF).
En effet, si l'ensemble des ONG s'est félicité de la reconduction du moratoire de 9 ans sur les ventes de l'ivoire, malgré la forte opposition des Etats d'Afrique du Sud, si l'élevage domestique des tigres demandé par la Chine
s'est vu opposer une fin de non recevoir, si l'anguille européenne (dont le prix peut excéder celui du caviar) bénéficiera d'une protection étendue et que les ministres européens de la pêche adoptaient en parallèle un plan de sauvetage de l'espèce, si le commerce international du poisson-scie devient illégal, c'est, en revanche un échec pour le requin-taupe, l'aiguillat commun, les coraux rouges et roses, ces derniers ayant vu un vote secret de dernière minute les radier de l'inscription à l'annexe II. Et si le bois brésilien utilisé pour la fabrication d'archet de violon sera mieux protégé, le Brésil s'engageant à restreindre sa commercialisation, l'Union Européenne a du renoncer à mettre un frein à l'exploitation, en Amérique Centrale et du Sud, du bois de cèdre et du bois de rose utilisés dans la fabrication d'instruments de musique du fait d'un refus des Etats d'Amérique latine.
Outre l'inscription de nouvelles espèces à ses annexes, la 14ème Conférence des Parties a été l'occasion pour la CITES
de définir une nouvelle stratégie d'action pour garantir l'application par les Etats membres des décisions prises, lutter contre la fraude, assurer des bases financières suffisantes, trouver d'autres instruments et des processus cohérents pour s'appuyer mutuellement. En ce sens, le fait que la Conférence
se tienne cette année en Europe a été propice à un renforcement des liens avec l'Union Européenne, ce dont se félicitent les organisations de protections de la faune et de la flore telles que WWF et TRAFFIC, l'Union Européenne représentant le second marché, après les Etats-Unis (près d'un tiers du marché mondial) des espèces sauvages.
Reste à donner les moyens aux Etats membres de respecter leurs engagements, et le Secrétaire-Général de la CITES
, Willem Wijnstekers, affirme qu'il lui faudrait une augmentation des fonds de 20%, uniquement pour se maintenir. Pour l'heure, aucune augmentation d'apport de fonds n'est prévue pour ses plus importants supports : les Etats-Unis et le Japon. La France
s'est engagée à verser une contribution immédiate de 50 000 dollats pour lutter contre le braconnage des éléphants, en Asie du Sud.
Sandrine Dumont de Rotterdam (Pays-Bas)