« Dans notre branche, nous sommes très discrets » explique un des dirigeants. S’agirait-il d’une entreprise de l’armement ? D’un produit hautement stratégique pour la France ? Pas du tout : d’un simple producteur d’arômes ! Mais « ils » ont toutes les raisons de jouer profil bas car les manipulations auxquelles « ils » se livrent sont en effet peu avouables…
Les industriels avaient un problème : à force de raffiner et de dénaturer leurs matières premières, ils se sont retrouvés avec des substances insipides voire amers, impossibles à faire admettre en l’état à des organismes naturellement humains. Comment faire avaler des plats sans saveurs à des consommateurs que l’on souhaite fidèles et dépensiers ? Deux solutions : en amont, les arômes et les exhausteurs de goûts se chargeront de donner un semblant de vie aux préparations ; en aval, le marketing et la publicité feront croire à un produit de qualité supérieure.
« Les producteurs d’arômes ne parlent pas volontiers de leurs clients, ni des produits qui bénéficient de leur savoir-faire. [...] Nul ne connaît ces entreprises, mais leurs produits sont dans toutes les bouches, du matin au soir [...] » rappelle Hans-Ulrich Grimm dans son livre coup de poing Arômes dans notre assiette, la grande manipulation.
« Les aliments sont tellement traités, déshydratés, malaxés qu’ils perdent toute saveur. On y ajoute donc des éléments chimiques. Il y a une usine immense, à Dayton, qui ne fait que ça : des arômes. On y fabrique le goût de la viande, le goût de la sauce, des additifs en tout genre. Mais aussi l’odeur des parfums […] Dans un banal milk-shake fraise, on compte 50 produits chimiques. » témoigne pour sa part E. Schlosser dans Fast Food Nation.
La majorité des produits industriels, du chocolat du petit déjeuner au couscous du soir en passant par la soupe doivent leur goût à la compétence de chimistes. Les arômes incorporés sont-ils au moins naturels ? Souvent oui (le terme « arômes artificiels » fait encore chez nous mauvais genre sur l’emballage) mais l’interprétation de « naturel » est parfois alambiquée : comme toute la production mondiale de fraise ne suffirait pas à aromatiser 5% des produits au goût de fraise des seuls Etats-Unis d’Amérique et comme en plus le goût de fraise supporte mal le temps, on utilise souvent… des copeaux de bois d’Australie ! Le bois aussi est naturel, non ?
Et c’est ainsi que, bon an mal an, l’Union européenne consomme chaque année 170 000 tonnes d’arômes industriels (40 000 tonnes pour la France !), auxquelles il faut ajouter 95 000 tonnes de glutamate, le célèbre exhausteur de goût qui ravit tant les papilles… « Quand on sait qu’il suffit de 5 mg d’un arôme artificiel pour donner un goût noisette à environ 6 millions de yaourts, on comprend vite que chacun des aliments que nous consommons, chacun des produits que nous achetons comporte au moins l’un de ces arômes. Il y en a, en fait, absolument partout : dans la quasi-totalité des produits alimentaires. Mais aussi dans tous les produits qui ont un parfum […] et même dans ceux qui n’en ont pas car il existe aussi des arômes pour masquer les mauvaises odeurs dues au traitement industriel. » précise le magazine Quelle Santé.
Comme le souligne Grimm, le problème est que notre sens du goût a aussi pour vocation de nous prémunir contre les aliments non consommables, l’amertume agissant comme un signal d’alerte. « Si on la masque, l’organisme risque d’absorber des produits qui lui sont préjudiciables » dénonce l’auteur. Un autre problème est que les arômes induisent l’organisme en erreur : « un arôme de bœuf indique à l’estomac qu’il aura bientôt à transformer de la viande, mais rien ne vient. Le système tourne à vide et provoque inévitablement une sensation de faim. » explique Quelle Santé. Accessoirement, la nocivité de la plupart des molécules aromatiques n’a jamais été étudiée et leur combinaison encore moins…
Ce n’est pas le cas de tous les additifs alimentaires.. . 490 références et études scientifiques auraient été publiées sur le sujet entre 1950 et 1993. « Pire que les arômes : les exhausteurs de goût » titrait ainsi le magazine Quelle Santé en Juin 2006. Les exhausteurs synthétiques E 620 à E 650 sont tous suspects et de préférence à éviter mais le pompon est décroché par le E621, plus connu sous le nom de glutamate monosodique ou monosodium (GSM en français, MSG en anglais).
Cet additifs qui, selon Corinne Gouget, « peut rendre aussi dépendant que la nicotine ou que certaines drogues » est présent dans quasiment tous les aliments industriels sous diverses appellations (protéines ou graisses hydrolisées ou hydrogénées, gélatines, caséinate de sodium ou de calcium, protéines texturées, extraits de levure,…) Outre l’augmentation des prises alimentaires induisant l’obésité (le GSM serait utilisé par les scientifiques pour rendre les rats de laboratoire obèses !), il est le premier responsable du « syndrome des restaurants chinois » qui se traduit par des nausées et des vomissements. On lui attribue également des cas d’allergies et une aggravation des symptômes de l’asthme et certains chercheurs lient la surconsommation de glutamate aux maladies de Parkinson et d’Alzheimer.
Cerise sur le gâteau (industriel) : l’un des plus gros producteurs de glutamate est une entreprise chinoise responsable de la pollution des rivières et de la nappe phréatique des villages chinois alentours. Résultats : cancers à gogo chez les villageois ! Décidément, que du bonheur !
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Sources :
Hans-Ulrich Grimm, Arômes dans notre assiette, la grande manipulation, Terre Vivante, 2004
E. Schlosser, Fast Food Nation.
Dur à avaler, Le Nouvel Observateur N°2193, 16 novembre 2006, François Forestier, p. 142
Arômes : les faussaires du goût, Quelle Santé N°6, Juin 2006, p. 6
La malbouffe rend-elle dépendant ?, Biocontact N°167, Mars 2007, Claudine Richard, p. 51
Pire que les arômes : les exhausteurs de goût, Quelle Santé N°6, Juin 2006, p. 8
Corinne Gouget, Additifs alimentaires, Ed. Chariot d’Or, 2006
Silence, la Chine pollue… et tue à petit feu, Marianne N°507, 6 janvier 2007, Luc Richard, p.45
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