Pierre Jallatte, patron de la société éponyme, s'est suicidé vendredi. Il ne voulait pas "voir mourir son entreprise" menacée de délocalisation..
Le village cévenol de Saint-Hippolyte-du-Fort a rendu hommage, samedi, au fondateur de la société Jallatte qui s'est suicidé à l'âge de 88 ans, "un grand monsieur" qui ne voulait surtout pas "voir mourir son entreprise" menacée de délocalisation. Quelques semaines avant son 89e anniversaire, Pierre Jallatte s'est tué d'un coup de fusil, vendredi, dans une chambre de sa maison de Nîmes où l'a découvert son épouse, selon le parquet du tribunal de Nîmes.
L'ancien patron s'est donné la mort le jour même d'une réunion cruciale à la préfecture de Nîmes sur le projet de délocalisation vers la Tunisie de toute la production française, menaçant 285 emplois dans le Gard. "Un geste peut-être, pour montrer que Pierre Jallate croyait lui, toujours, en cette entreprise, qu'il ne fallait pas la fermer", commente le président (PS) du conseil général du Gard, Damien Alary, évoquant "un grand monsieur".
Quelques heures avant la découverte de son corps, les syndicats annonçaient à Nîmes que le projet de délocalisation vers la Tunisie de toute la production française était "suspendu" jusqu'au 18 juin, un accord ayant été trouvé avec le groupe italien Jal (propriétaire de Jallatte) lors d'une table ronde. Le projet initial prévoyait la suppression de 285 emplois sur les 336 de Jallatte en France, principalement à Saint-Hippolyte-du-Fort et dans la ville d'Alès (Gard).
La petite fabrique de galoches que Pierre Jallatte avait reprise en 1947 était devenue dans les années 1980 une société aux 900 employés. Reprise par un fonds d'investissement, elle est intégrée au groupe italien Jal, plus grand fabricant européen de chaussures de sécurité professionnelles, racheté en 2005 par un consortium de banques anglo-américaines mené par Bank of America et Goldman Sachs.
Très ému, l'ancien directeur de production Georges Argeliès, 75 ans, répète les propos tenus à l'annonce du projet de délocalisation, fin mai : "il y a dix jours, j'ai dit à Giovanni Falco (PDG de Jal, ndlr) et à Joël Aunos qu'ils étaient des voyous, méritant d'être pendus haut et court. Je redis que ce sont eux et les actionnaires qui ont tué Pierre Jallatte, ce sont des assassins, c'est de leur faute s'il n'est plus là !", rapporte l'AFP.
Pour Georges Argeliès, qui avait débuté comme ouvrier à la fabrique de "Saint-Hippo" en 1950, avant de superviser la production pendant vingt-cinq ans, c'est tout le village de 3.500 habitants qui est en deuil : "la moindre famille de Saint-Hippolyte a quelqu'un qui a travaillé chez Jallatte."
latribune.fr, avec agences