Pour le nucléaire, il y a le Criirad qui se bat depuis des années sinon pour l’arrêt du nucléaire dans notre pays, du moins pour une information transparente sur son déploiement passé et sur son rôle aujourd’hui dans la filière énergétique française. Dans le domaine des rayonnements électromagnétiques, le pendant du Criirad se nomme Criirem.
Criirem pour "Centre de recherche et d'information indépendantes sur les rayonnement électromagnétiques (Criirem)". Le mot le plus important dans l’appellation de cette association est l’épithète "indépendantes", tant il est vrai que toutes les études ou presque menées au cours de la dernière décennie sur la nocivité ou l’innocuité des rayonnements électromagnétiques (GSM, réseaux sans fil, etc.) l’ont été avec pour "sponsor" un fabricant ou un opérateur qui n’allait évidemment pas, de façon volontaire, couper la branche sur laquelle il était juché …
Voilà pourquoi l’étude indépendante – mais tout à fait militante, que vient de publier le Criirem, risque de faire office de pavé dans la mare, quand bien même ne concerne-t-elle qu’une toute petite partie du parc des téléphones mobiles, en l’occurrence les modèles hybrides GSM/WIFI. Cette étude met en garde contre des risques possibles provoqués par des téléphones mobiles hybrides GSM/Wi-fi, capables de "switcher" d’un mode dans l’autre (ce qui est très rare), portés contre la peau du visage ou tenus à la main (c’est-à-dire sans oreillette filaire ou bluetooth) !
Inacceptable
Pour le Criirem, dont le communiqué de presse a été massivement distribué aux principaux organes de presse ainsi qu’aux opérateurs et au Ministère de l’Industrie, il ne s’agit pas de jouer les Cassandre. Mais d’avertir… De quoi ? De l'arrivée de téléphones bi-mode, "conjuguant les réseaux GSM et Wi-Fi et capables de passer d'un système à l'autre sans rupture de conversation" (c’est encore quasi-introuvable sur le marché français). Pour le Criirem, la chose est "d'autant plus inacceptable qu'elle contredit les recommandations sanitaires formulées par tous les experts". Au-delà, le message devient carrément plus militant, quand il dénonce avec force "la volonté industrielle du ‘tout sans fil’, qui additionne et multiplie les sources d'exposition sans aucune étude sanitaire ni avertissement préalable".
"Lors de l'usage d'un téléphone Wi-Fi, ou la proximité quotidienne avec un point d'accès, les expositions au Wi-Fi s'additionnent et peuvent provoquer, dans la durée, des réactions biologiques" (sensations de chaleur, pulsations crâniennes, fatigue, migraines, insomnies..), indique Michèle Rivasi, ex-députée de la Drôme de 1997 à 2002, fondatrice du Criirad (après le passage de Tchernobyl et le mensonge d’état qui s’en suivit) et aujourd’hui présidente du Criirem. En effet, tandis que "les rayonnements GSM se situent dans des fréquences de 900 ou 1 800 mégahertz (Mhz), un terminal en mode Wi-Fi émet des ondes pulsées à 2 450 Mhz, la fréquence optimum pour agiter les molécules d'eau - c'est-à -dire exactement celle utilisée par un four à micro-ondes", explique le communiqué.
L’interrogation sur " l'impact d'un téléphone Wi-fi sur l'eau présente dans la peau ou le liquide céphalo-rachidien qui baigne le cerveau" est pour le moins légitime, d’autant que le conseil scientifique du Criirem ajoute " qu’ il n'y a pas de seuil pour le déclenchement de réactions de type ‘syndrome des micro-ondes’ ". Cela dit, on pourra rétorquer qu’il semble étrange dès lors de s’attaquer qu’à la téléphonie mobile, fut-elle hybride. Pourquoi pas carrément s’attaquer au principe même du Wi-Fi qui ne présentait guère de danger jusqu’à la norme G, mais qui voit son rayonnement boosté par le MIMO et surtout le "N" en cours de déploiement, y compris dans certains foyers. Et que dire alors du WiMax, qui devrait être la seule solution pour certaines provinces isolées des grands réseaux pour accéder au haut voire au très haut débit ?
La seule étude à ce jour…
En avril 2007, une étude conduite par la grande école de Gif-sur-Yvette Supélec et publiée par l'Autorité de régulation des télécommunications (Arcep, ex-ART) donnait un certain nombre de recommandations de sécurité. Parmi elles, le fait de positionner les points d'accès des équipements Wi-Fi "en hauteur (plus haut que la hauteur de la tête), pour limiter l'exposition des personnes et pour augmenter le rayon de couverture". La même étude conseillait en outre "d'éviter de toucher de façon prolongée l'antenne" qui assure la connexion. Et le Criirem de s’interroger : "Les utilisateurs de téléphones Wi-fi, portés contre l'oreille ou tenus à la main, ont-ils été prévenus de cet avertissement ?"…
Alors quid d’Unik chez Orange ou des solutions mobiles hybrides proposées par Free, Twin et Twin Tact chez Neuf ? Pas encore de réaction officielle du côté des opérateurs, si ce n’est de s’en tenir aux préconisations de l’Arcep qui font foi et de s’appuyer en conséquences sur la "seule étude scientifique probante réalisée à ce jour" (celle de Supélec). En outre, "en off", certains de nos correspondants interrogés au téléphone (sans fil…) nous diront que le communiqué du Criirem est desservi par son côté militant et par un certain nombre d’inexactitudes ou d’amalgames totalement erronés(1). Trop de "on dits" ne pourraient faire œuvre d’étude scientifique, même si ces "on dits" sont repris par une scientifique…
Il n’empêche, le débat reste ouvert et les effets potentiels du WiFi reviennent régulièrement à la une de l’actualité technologique. Ainsi, le Royaume-Uni et une région des Pays-Bas ont-ils tenu (mais sous la pression des parents d’élèves) à désinstaller les réseaux sans fil mis en place dans les établissements, alors même que les directions de la santé néerlandaises et britanniques conservent, comme leurs consœurs partout en Europe, une ligne neutre et demande à ce que les risques puissent être évalués sur le long terme, l’innocuité sur le court terme étant donné comme postulat de base.
(1) Une confusion parmi d’autres décelables dans le communiqué : il indique que l'offre Happy Zone de SFR fait partie des terminaux GSM / Wi-Fi. Or, il n’en est rien. De même différents appareils, déclarés comme capables de « switcher » automatiquement du mode GSM au mode Wi-Fi sitôt arrivé dans une zone couverte par le Wi-Fi, n’offrent pas un tel service. Avec eux on peut passer un coup de fil en GSM ou en Wi-Fi, mais l’un est indépendant de l’autre et par exemple le Wi-Fi est désactivé en cas d’appel GSM "classique"…