« Les gens acceptent de sortir de leur bulle, de faire entrer quelqu'un dans leur voiture. » Le gérant du site de covoiturage 123envoiture. com, Arnaud Sarfati, est optimiste. L'idée de ce réseau lui est venue pendant les grèves de 1995. Elle a pris corps avec le développement d'Internet. « On avait environ 5 000 adhérents en 1997, entre 70 000 et 80 000 en 2003. » Aujourd'hui, il relève 3 000 à 4 000 visites par jour, soit une croissance de 30 % par an.
5 % des trajets domicile-travail
Laurent Lancarre trouve, lui, que ça pourrait avancer beaucoup plus vite. « On s'y perd et ça ne marche pas. Il y a trop de sites et pas assez de visiteurs sur chacun. Il faudrait massifier, fédérer tout ça », s'énerve le responsable des politiques de déplacement urbain à l'Ademe (Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie). Une enquête du Certu (Centre d'études sur les réseaux, les transports, l'urbanisme et les constructions publiques) dénombre, en France, « plus de 80 sites de covoiturage, grand public ou ciblés sur une région ou sur une entreprise, et 500 000 personnes inscrites sur l'ensemble des sites ».
Pour Laurent Lancarre, le covoiturage est victime de son succès. « Les sites se satisfont de la mise en relation entre les personnes. Au début, ça marche. Mais les aléas de la vie quotidienne - un enfant malade, un changement d'emploi du temps - font que ça s'essouffle rapidement. C'est facile de revenir en arrière à la moindre difficulté. »La solution pour lui : encadrer plus et tirer les leçons des expériences de nos voisins. « Ils ont pratiquement tous arrêté. Aux Pays-Bas, où il y avait beaucoup de zones de covoiturage, beaucoup de lieu de rencontres, tout est à l'abandon. En revanche, ça marche bien en Angleterre, parce que c'est géré dans les entreprises. »L'Ademe a changé de stratégie. « On a arrêté les subventions aux sites Internet, à tout ce qui trop généraliste. Aujourd'hui, on donne des subventions élevées à des entreprises, collectivités, associations. Il faut qu'il y ait un lien au départ - géographique, professionnel... - entre les personnes et un responsable de projet. »Les initiatives ne manquent pas. Selon l'étude du Certu, « plus de 90 entreprises et administrations ont pris des mesures en faveur du covoiturage ». Mais il ne concerne encore que 5 % des trajets domicile-travail. « 75 % des utilisateurs sont des étudiants qui font des trajets ponctuels », observe Arnaud Sarfati.
Pourtant, les bonnes raisons de « covoiturer » sont nombreuses. Le budget moyen d'un automobiliste atteint 378 € par mois ; 25 % de la pollution atmosphérique est due aux transports. Sans parler des galères de parking et des bouchons.
Léonore MAHIEUX.