Marketing environnemental : l’automobile française à la traine Sans faire l’apologie de l’automobile, nous pouvons remarquer que depuis quelques années l’argument environnemental fait son apparition dans les campagnes marketing des grands constructeurs. Avec l’intensification des normes antipollution européennes cet argument prend une part grandissante. Alors que les constructeurs français sont encore dans le peloton de tête, leur marketing réagit tardivement au phénomène du développement durable. "1 million de véhicules hybrides vendus dans le monde", claironne Toyota ! "Pionnier dans la protection de l’environnement" lance sans sourciller Opel. L’écologie est à la mode et l’automobile s’y met. Des campagnes de grande envergure lance des arguments dans ce sens en ne montrant parfois même pas les modèles en vente. Mais que font nos constructeurs ? Il faut se souvenir pourtant que General Motors introduit le pot catalytique dès 1974, bien avant que l’Europe se soucie de ce sujet. Il faut également se souvenir que le groupe PSA a lancé le premier filtre à particule. Ce lancement s’était accompagné d’une image "écologique" forte en Allemagne qui avait permis d’augmenter les ventes. Mais après ? PSA, tout comme Renault ont poursuivi leur politique de dieselisation qui a permis d’abaisser significativement le taux de CO2 moyen de la gamme jusqu’à mener les deux groupes dans le peloton de tête des constructeurs européens. Entre temps le filtre à particule s’est perfectionné chez d’autres constructeurs jusqu’à intégrer les premiers filtres de NOx. Une invention que Toyota utilisa aussitôt pour renforcer son image écologique. Car du coté français la communication a été très désordonnée. Qui trouve-t-on en tête des constructeurs ayant une bonne image "écologique" ? En premier, il y a Toyota grâce à ses modèles hybrides et ses filtres de NOx. Et puis viennent des constructeurs comme Honda(encore pour l’hybridation) et nos constructeurs nationaux, FIAT, VW....loin derrière. C’est évidemment faire oublier que Toyota a dans sa gamme des modèles gourmands et polluants comme le Pick-up Toundra V8 5,,7l disponible aux Etats Unis. Toyota reste dans une logique commerciale d’occuper tous les segments du marché et même si son modèle consomme moins que les concurrents américains il est le total opposé de la Prius Une étude récente a montré l’impact du marketing sur cette image. A chacun de ces lancements, l’image perdure pendant environ 2 ans avant de retomber au même niveau que les autres. Toyota avec sa succession de création et d’amélioration des systèmes hybrides a bien compris ce phénomène. Pourtant PSA annonce fièrement (mais de manière très désordonnée) avoir 140g/km CO2 en moyenne pour sa gamme en France. Cela tient compte des volumes de vente. Ce chiffre arrive, triste coïncidence, en même temps que le lancement du SUV(comprendre 4X4) du groupe. Etant donné ses volumes, il n’influencera pas beaucoup les chiffres de l’année prochaine qui stagneront. Renault et Fiat suivent à quelques encablures. La raison est très simple pour ce leadership : Ces trois constructeurs vendent en priorité des petits modèles et sont fortement dieselisés. Car si les constructeurs se vantent de faire baisser le CO2, personne ne parle de l’augmentation des particules et des NOx rejetés, dûe à la surdieselisation du marché. (Elle n’est pas seulement due à l’automobile d’ailleurs. ) Les objectifs de ces même constructeurs sont aussi identiques : vendre des modèles plus gros et plus chers à l’avenir car les marges commerciales sont supérieures. Ce qui va à l’opposé des normes environnementales. Fort heureusement, les futures normes EuroV et EuroVI vont sévériser les rejets de NOx et particules ce qui va obliger les constructeurs à de plus en plus d’ingéniosité. Cela se fera avec une hausse des prix et une probable fragilisation des moteurs par l’encrassement de circuits d’admission de plus en plus sophistiqués. Tous les constructeurs prennent le train du marketing écologique en marche. BMW impose le "start and stop" sur sa série 1 alors que Citroen n’a jamais osé le faire en pionnier qu’il était. Renault lance sa gamme Eco2 et le flexfuel, déjà présent depuis longtemps dans les pays nordiques et sud américains. Opel copie avec sa gamme EcoFlex, précédé par Ford, etc....PSA veut accélérer la sortie de modèles hybrides diesel, alors qu’hier encore il trouvait cela déplacé et non rentable. Pendant ce temps le marché américain (où les constructeurs français sont les seuls absents) est en pleine mutation avec des SUV et petits 4x4 dont les ventes explosent, des véhicules compacts dont les ventes dépassent les luxury cars autrefois symboles de la grandeur américaine. Même dans la tant critiquée Chine, une conscience écologique s’éveille peu à peu. Toyota y produit sa Prius, pour l’instant pour l’exportation mais sûrement pas sans arrière pensée. Quand à nos Constructeurs, ils s’appuient encore sur l’Europe avec ses ouvertures sur l’est et pratiquent le copier coller pour aborder la Chine Au final ils se retrouvent à suivre les évolutions du marché (PAC, hybridation, Bio carburants, ...) tandis que leurs motorisations "classiques" restent parmi les plus efficaces de leur classe. De même la norme ISO14001 devient un passage obligé pour les sites de production automobile. (Toyota Valenciennes a été pionnier) Cette norme permet d’afficher la "maîtrise" des sources de pollution mais ne fixe aucun objectif de diminution ou de seuil à atteindre. Mais qu le sait parmi les consommateurs cibles ? Dans l’esprit du consommateur, écologique signifie aussi "moins consommateur". Et comme le prix du pétrole augmente, cet argument écologique se transforme en argument purement économique. Oui le consommateur commence à vouloir payer un peu plus cher sa voiture pour avoir un coût d’utilisation moindre. Le seuil à ne pas dépasser est encore difficile à estimer et peut varier selon les pays. En utilisant l’argument écologique, l’Automobile essaye de redorer une image fortement écornée. Les évolutions technologiques à venir et les normes de plus en plus drastiques auront raison des groupes les plus fragiles. A ce petit jeu, il est urgent de voir nos constructeurs anticiper aussi bien techniquement que commercialement. Car l’environnement sera aussi une arme contre le spectre des constructeurs chinois. Si ils ne l’utilisent pas encore commercialement, les universités chinoises sont déjà à la pointe de ces évolutions. Carlos Ghosn et Christian Streiff arrivent donc en place à une période charnière de l’histoire de l’automobile. Espérons que les formules marketing seront enfin suivie d’effets bénéfiques sur l’environnement. |