Commandée par la Commission européenne, l’étude intitulée « Impact sur l’emploi du changement climatique et des mesures de réductions des émissions de CO2 dans l’union européenne à l’horizon 2030 et coordonnée par la confédération européenne des syndicats se montre un instrument convaincant sur lequel les acteurs du Grenelle de l’environnement d’octobre devront s’appuyer.
C’est une première : une étude scientifique a été menée pour déterminer l’impact qualitatif et quantitatif des modifications climatiques sur l’emploi en Europe à l’horizon 2030. Coordonné par la confédération européenne des syndicats, ce rapport se montre un instrument convaincant sur lequel les acteurs du Grenelle de l’environnement d’octobre devront s’appuyer. | |
Signataire du protocole de Kyoto, l’Union européenne s’est engagée à réduire, d’ici 2012, de 5% ses émissions à effet de serre. On connaît le scepticisme de beaucoup, tant la mesure est tardive. On connaît aussi la réticence des Américains et d’autres, tant la dimension économique continue de prévaloir. On commence à découvrir les inquiétudes sociales relatives au changement climatique. Permettra-t-il de créer des emplois ? Avec près de 400 millions d’actifs, l’UE ne pouvait continuer à ignorer le problème. Commandée par la Commission européenne, l’étude intitulée « Impact sur l’emploi du changement climatique et des mesures de réductions des émissions de CO2 dans l’union européenne à l’horizon 2030 », apporte plusieurs réponses, dont un premier indice plutôt rassurant. D’ici 2030, le réchauffement climatique devrait provoquer une augmentation de 1,5% de la population active. « Chiffre à prendre avec des pincettes », tempère Alain Mestre, expert co-auteur de l’étude, « le solde est légèrement positif mais il ne s’agit que d’une hypothèse obtenue par modélisation ». Premier ouf de soulagement des syndicats nationaux et de la confédération intersyndicale européenne (CES). On compte ainsi sur des transferts d’un secteur à un autre et à une requalification de certains travailleurs pour expliquer cet impact plutôt neutre. Il serait par exemple envisageable que des travailleurs comme les mineurs, dont le métier est en voie de disparition, puissent être requalifiés en ouvrier spécialisé dans l’isolation thermique, profession appelée à un bel avenir. C’est sur ce point qu’apparaît la première mise en garde : « N’oublions pas que certaines personnes ne sont pas forcément requalifiables », rappelle Laure Batut (FO) lors de la conférence de presse de présentation du rapport. Même son de cloche du côté de l’exécutif. « Il ne faut pas se voiler la face, il y aura des emplois créés, d’autres détruits. Ce qu’il faut, et c’est le sens du Grenelle de l’Environnement en octobre, c’est que les mutations se fassent le mieux possible, en mettant plusieurs acteurs sociaux autour de la table, dont les syndicats évidemment », explique Valérie Kosciusko-Morizet, secrétaire d’État auprès du ministre d’Etat chargée de l’Écologie. « Nous avons déjà une liste indicative de sujets qui seront abordés, la formation en fait partie », reprend-elle. Gérer les transferts de main d’œuvre, former les requalifiés, accompagner ceux qui ne pourront pas l’être sont quelques-uns des enjeux cruciaux. Si le solde devrait être globalement positif en termes d’emploi, les conséquences territoriales et sectorielles seront inégales. « Les communautés d’emploi qui dépendent des secteurs primaires comme l’agriculture, la foresterie et la pêche sont plus vulnérables aux effets du réchauffement climatique », souligne l’étude. Peu de chiffres dans l’étude, mais des pistes de réflexion. « Cette étude est opportune, car elle permet une approche globale mais concrète car sectorielle et territoriale », souligne Jean-Christophe le Duigou, secrétaire de la CGT. D’un point de vue géographique, la généralisation masque des inégalités. Le rapport insiste par exemple sur le possible déficit de fréquentation touristique dans les régions de l’extrême sud de l’Europe devenues arides ; tout en admettant qu’au plan agricole, malgré les risques de sécheresse, ces mêmes régions pourraient alors trouver bénéfice à développer de nouvelles cultures. Difficile donc de tirer des leçons précises de l’étude. Tout son intérêt réside dans la nouvelle dimension qu’elle donne à l’environnement. La préoccupation écologique sort du rôle de gadget auquel on l’a souvent cantonnée. La nomination d’un ministre d’Etat à un poste élargi en est une illustration, le rapport sur le lien entre le réchauffement et l’emploi aussi. « L’étude du CES va dans le sens de la nouvelle dimension qu’on donne à la préoccupation environnementale, l’écologie n’est plus l’apanage d’un ministre, c’est devenu une composante essentielle dans la mise en œuvre des politiques », argue la secrétaire d’Etat à l’Ecologie. Rendez-vous en octobre, lors du Grenelle de l’Environnement, pour mesurer l’ampleur de la nouvelle révolution verte. |