Le virus qui a touché deux exploitations britanniques provient bien du laboratoire Merial ou de l'Institute for Animal Health, estiment les autorités. Les animaux du deuxième foyer d'infection ont été incinérés à une dizaine de kilomètres du lieu d'infection.
La dissémination du virus de la fièvre aphteuse est très probablement liée à une erreur humaine commise dans l'un des deux laboratoires proches de la zone contaminée en Angleterre. Alors qu'un deuxième cas de fièvre aphteuse a été confirmé, hier, dans le Surrey (ouest de l'Angleterre), le rapport des autorités sanitaires britanniques pointe du doigt le laboratoire Merial et l'Institute for Animal Health, situés à 5 km du premier foyer. « Il y a une forte possibilité que la souche de fièvre aphteuse vienne de là », affirme le rapport. Ces deux laboratoires, spécialisés dans cette maladie, ont travaillé sur le virus ces dernières semaines.
Des vaccins commandés à Merial Le 16 juillet, Merial, une joint-venture entre le Français Sanofi-Aventis et l'Américain Merck, produisait des vaccins contre la fièvre aphteuse, en très large quantité (10 000 litres). La souche qu'il a utilisée était la même que celle qui a infecté les animaux. Le deuxième laboratoire, l'Institute for Animal Health, qui appartient au gouvernement britannique, réalisait, à la même époque, des expériences sur cette souche du virus. Mais sur de très petites quantités, de moins de 10 millilitres. Comment le virus s'est-il échappé d'un laboratoire extrêmement sécurisé ? Le rapport estime que l'erreur humaine est « une vraie possibilité ». Mais il précise que cela a pu être un acte « délibéré ». Une autre hypothèse est que les inondations du mois dernier aient provoqué la contamination, mais cela est jugé très improbable. Malgré les soupçons, les responsables du laboratoire Merial restent persuadés que la fuite ne vient pas de chez eux. Leur enquête interne a montré que les mesures de sécurité ont été intégralement respectées. Paradoxalement, pour se conformer aux règles communautaires, le gouvernement britannique a dû commander, hier, 300 000 doses de vaccin à Merial. Il est l'un des quatre seuls labos autorisés par l'Union européenne à manipuler le virus. Les vaccins sont actuellement en cours de production. À seulement quelques kilomètres du premier foyer d'infection, un deuxième troupeau a été contaminé. Les symptômes ont été détectés, lundi soir, lors d'un contrôle vétérinaire. L'abattage des 102 vaches a immédiatement commencé. Le deuxième foyer se situe à l'intérieur de la zone d'exclusion de trois kilomètres, qui entoure le premier emplacement contaminé. « Le fait que les deux troupeaux malades soient proches de Pirbright (le site des laboratoires) montre bien que le virus vient d'une même source », affirme Anthony Gibson, le directeur de la communication du NFU, le principal syndicat agricole. Roger Pride, le premier éleveur touché, s'est exprimé hier dans les médias britanniques : « Je ne pouvais pas le croire quand j'ai appris la nouvelle, explique-t-il, visiblement choqué, le regard dans le vide. Mon univers a été entièrement bouleversé. » Jeudi soir, son troupeau présentait des symptômes étranges. « Les vaches étaient léthargiques, elles salivaient beaucoup. Elles marchaient très lentement. » L'éleveur a immédiatement averti les autorités sanitaires, arrivées sur place une heure et demi plus tard. Le lendemain, dans l'après-midi, la fièvre aphteuse était confirmée. Les mesures de sécurité prises depuis ont suscité plusieurs polémiques. La première concerne la destruction des vaches abattues. Les carcasses ont été déplacées de plusieurs dizaines de kilomètres, jusqu'à un incinérateur. Les bûchers en plein air de 2001 avaient traumatisé le grand public. La seconde a trait aux sentiers piétonniers dans la zone d'exclusion. Ceux qui mènent aux fermes infectées ont été fermés, mais pas les autres. Pourtant, le virus peut être transporté sur des chaussures. Le NFU s'inquiète : « Il vaut mieux prendre trop de précautions que pas assez », martèle son porte-parole. Éric ALBERT.