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Les propositions concrètes du ministre en ont soulagé plus d’un. «Je devais licencier tout le personnel avant la fin de l’année, 42 personnes, dont 37 emplois permanents. On était arrivé à un point de non-retour », rappelle Didier Olivry, directeur du parc naturel régional (PNR) de Camargue. Jusqu’à ce que Jean-Louis Borloo vienne mettre fin au conflit le 2 août dernier. La charte du parc, qui arrivait à échéance en février prochain, est prolongée de deux ans; une nouvelle charte est en préparation pour 2008, et surtout une loi pour la création d’un nouveau syndicat mixte est prévue pour octobre, explique-t-on au conseil régional de Provence-Alpes-Côte-d’azur (Paca).
Depuis 2001, la gestion du parc n’est plus entre les mains de la fondation de propriétaires fonciers, ce qui était le cas depuis sa création en 1970. Il s’agit de grandes familles camarguaises qui possèdent plus de la moitié des 30.000 hectares de terres de Camargue. Six années de conflits entre propriétaires et collectivités territoriales ont suivi, chaque partie s’estimant spoliée. Et ce sont des retours successifs à l’envoyeur qui ont suivi chaque décret du ministère chargé de l’environnement créant un nouvel organisme de gestion.
«Les formules destinées à amener un nouveau gestionnaire n’étaient jamais suffisamment étayées juridiquement», reconnaît Didier Olivry. Formules qui volaient en éclat à cause de la rigueur procédurière d’Alain Grossi, riziculteur, auquel aucun nouveau texte gouvernemental ne résistait. Ainsi, le groupement d’intérêt public (GIP) de 2001, qui faisait passer de 20 à 7 le nombre de propriétaires, fut annulé le 14 janvier 2003 par le Conseil d’Etat. Idem pour le syndicat mixte créé en 2004, annulé par la même cour administrative le 19 février dernier: aucune procédure de révision de la charte ne pouvait être engagée. «Il fallait passer par une loi pour que Grossi ne fasse pas un recours», lâche Hervé Schiavetti, maire d’Arles.
L’enjeu du 2 août dernier était de mettre tout le monde d’accord. Et la survie non seulement de la plus grande zone humide de France, mais aussi de nombreux Camarguais (le parc accueille plus d’un million de visiteurs par an), valait bien la création d’une loi, «juste pour le parc, pour qu’il n’y ait pas de frustrations», commente Didier Olivry. Cette loi permettra d’ouvrir le syndicat mixte à une association syndicale autorisée (ASA), représentant les propriétaires fonciers. «Il fallait bien l’arrivée de Borloo: on est dans le midi, il faut de la mise en scène», plaisante Didier Olivry.
L’agriculture de rizière, culture de base de la plupart des gros propriétaires, était un enjeu de taille pour la survie du parc. «La Camargue est un milieu artificiel. Il n’y aurait pas eu une goutte d’eau s’il n’y avait pas eu de riziculteurs», souligne Bernard Arsac, président de la fondation des propriétaires fonciers. Ce sont en effet 400 millions de mètres cube d’eau pompés dans le Rhône chaque année qui permettent la préservation du biotope camarguais. Riche d’une grande biodiversité, le parc accueille 60 espèces d’oiseaux migrateurs chaque année.
Un bémol cependant: l’équilibre est fragile. Riziculteurs et saliniers imposent une hydrologie du delta inverse au régime naturel, qui ne favorise pas la conservation des espèces les plus originales. Mais une chose est sûre: quelles que soient les activités -préservation du milieu, chasse, coupe du roseau, croissance du riz-, et leurs besoins en eau, celle-ci est désormais au centre de toutes les convoitises. |