De nombreux thoniers senneurs battant pavillon libyen sont actuellement stationnés dans les ports français de Sète, Marseille ou Grau d'Agde. Ces bateaux sont pour la plupart d'anciens bateaux français, sortis de la flotte, et passés sous pavillon libyen par un armateur français en partenariat avec un armateur libyen. Pour Greenpeace, cette pratique, qui permet aux thoniers senneurs de pêcher sous quota libyen, pose de gros problèmes de responsabilité quant à l'avenir de la ressource.
Pour la première fois, les autorités françaises reconnaissent enfin que ces bateaux pêchent bien sous quota libyen (voir AFP le 9.09.07) ; certains armateurs admettent de même pêcher à la fois sous quota libyen et sous quota français.
Cette pratique, apparue à la fin du 90, s'est énormément développée... En effet, la Libye, dont les eaux sont très riches en thon rouge, est un véritable trou noir en termes de gestion du stock. « La Libye n'effectue aucun contrôle des quotas sur cette pêche extrêmement rentable. On ignore quelle est la quantité de thon effectivement pêchée par les bateaux « libyanisés »... En s'adjoignant un bateau sous pavillon libyen, les armateurs français s'ouvrent une porte vers des pêcheries non déclarées » précise Stephan Beaucher, responsable de la campagne océans à Greenpeace.
La Libye est membre de l'ICCAT (Commission internationale pour la conservation des thonidés de l'Atlantique) et a partiellement entériné le plan de sauvegarde de novembre 2006. De très nombreuses zones d'ombre subsistent sur la gestion du stock libyen... Jeudi dernier, un palangrier libyen a débarqué 96 tonnes de thon rouge illégal à Malte. Or, la pêcherie palangrière est fermée depuis le 1er juin et un tiers de la cargaison était issue d'un autre bateau libyen et a été transbordée à Tripoli, port qui n'est pas autorisé par l'ICCAT à faire ce type d'opération. On ignore également le nombre de fermes d'engraissement en activité en Libye... Enfin, la Libye a étendu sa souveraineté bien au delà des 20 milles pour créer une « zone de protection des pêches » quasiment impénétrable.
« Si rien n'est fait, comme plus de la moitié des stocks de thon se trouve dans ses eaux ou au large de ses eaux, la Libye jouera un rôle pivot dans l'effondrement du stock prévu par les scientifiques d'ici 1 à 5 ans ! précise Stephan Beaucher. Il est inacceptable que les armateurs français participent, même indirectement à ce hold-up sur une ressource dont l'exploitation est multi-millénaire. Tant que l'ICCAT n'aura pas la volonté politique de contrôler cette pêcherie, en contraignant ses états membres à mettre en œuvre les moyens nécessaires, l'avenir du thon rouge restera menacé. »