Edidifiant reportage diffusé sur France 2 dans Envoyé Spécial sur le volcan "Lapindo". A Sidoarjo sur l'île de Java en Indonésie, le 29 mai 2006, à 150 mètres d’un forage exploratoire effectué par la société pétrolière Lapindo, une épaisse fumée sort soudain de terre, bientôt suivie de boue. Une boue brûlante, venue de 3000 mètres de fond. De semaine en semaine, le débit augmente, et finit par atteindre 150 000 m3 / jour, celui d’un fleuve. Depuis, la coulée n'a pas céssé.
Lapindo, la société pétrolière, clame son innocence et invoque le séisme de Jogjakarta, qui s’était produit l’avant-veille à 400 km mais une large majorité d’experts met directement en cause le forage qui n’aurait pas été sécurisé. Deux questions… Les hommes sont-ils entièrement responsables de cette catastrophe écologique ? Est-ce la recherche effrénée de gaz et de pétrole qui a conduit à ce saccage durable de l’environnement.
Sidoarjo, éruption non naturelle
Six mois plus tard, la situation est toujours difficile : 45O hectares sont recouverts de boue, plus de 10.000 habitants ont été évacués, la boue jaillit toujours, des affaissements de terrain se produisent, des routes et voies ferrées sont désormais fermées car il n'est plus possible de les protéger contre l'invasion boueuse.
Les autorités ont interdit au public un large périmètre autour du lac de boue, par crainte entre autres des émanations toxiques (phénols) et des risques d'explosion des gaz volatils inflammables. Une solution envisagée pour limiter les dégâts est de détourner une partie du flux de boue dans l'océan via le fleuve proche ou bien via un canal à creuser. Cette solution est décriée par les protecteurs de l'environnement à cause de la toxicité des boues et leur effet dévastateur sur les écosystèmes fluviaux et côtiers dans une région dont la pêche est une ressource importante. Les autorités répondent qu'il faut « choisir entre sauver des poissons et sauver des hommes » (de l'engloutissement de leur village). Un moindre mal pourrait être le traitement des boues dont seule l'eau serait ainsi évacuée.
La boue est due à la remontée de fluides sous pression : généralement de l'eau contenant des gaz (méthane et autres gaz) issus soit de la maturation de la matière organique enfouie, soit liés à des réactions magmatiques, ou des fluides hydrothermaux. Ce phénomène est connus aux alentours des grands gisements d'hydrocarbures. L'accumulation de ces gaz dans un piège géologique provoquent la surpression. Les fluides peuvent être comprimés par effet tectonique, comme c'est le cas dans les zones de subduction où des sédiments hydratés sont continuellement enfouis à la base des prismes d'accrétion.
La remontée vers la surface de ces fluides, lorsqu'ils traversent des couches argileuses, peut alors entraîner la mobilisation des argiles et la formation de volcans de boue. Selon la viscosité de la boue, des lacs de boue fluide se forment ou bien des édifices pouvant aller jusqu'à 500 m de haut se mettent en place. Initialement, à Sidoarjo, la thèse de l'accident de forage ne faisait aucun doute. La société Lapindo aurait percé une poche de gaz sous pression sans en contrôler les effets. Cette société a d'ailleurs entrepris les travaux d'endiguement, des essais infructueux de colmatage et a indemnisé les personnes déplacées à hauteur de 2 ans de loyer pour se reloger. Cependant, des scientifiques indonésiens ont mis ce surgissement soudain de boue en relation avec le tremblement de terre de magnitude 4 qui a ébranlé la région deux jours plus tôt. Ce séisme aurait fracturé en profondeur la roche réservoir et permis l'évacuation des fluides sous pression.