Quand la croissance verte oublie son objectif premier, on en arrive à des situations qui pourraient prêter à rire si l’enjeu n’était pas aussi grave. Ainsi de la pratique de l’achat de neutralité carbone, proposée par de nombreuses compagnies spécialiées (tels Climat Mundi ou The carbon Neutral Company) ou non (les loueurs de voitures, qui permettent de voyager "carbone-neutre", par exemple).
Un article édifiant du LA Times relate les exemples de projets destinés à diminuer les émissions de CO2, qui étaient déjà financés, et pour lesquels la décision de mise en application était déjà prise, et qui ont fait l’objet en surplus de financements provenant de sociétés achetant du carbone pour le revendre aux possesseurs de 4*4 (ou aux producteurs de "Une vérité qui dérange").
On en arrive alors au paradoxe suivant : pour compenser une activité qui augmente les émissions de GES, on finance un puit de CO2 qui de toutes façons était déjà en chantier. Un jeu à la fin duquel les émission de Gaz à effet de serre n’ont donc pas diminué, puisque l’argent du culpabilisé n’a pas servi à augmenter les capacités d’absorption globales du système.
Pire, certains "revendeurs" de CO2 (Native Energy aux USA) s’approprieraient 100% du carbone économisé par des projets qu’ils n’ont financé qu’à hauteur de quelques pourcents. Les méthodes de calcul du CO2 prétendument économisé seraient elles aussi assez largement farfelues : Native Energy surévalue par exemple l’électricité produite par un projet qu’elle finance en Alaska au prétexte que, sans son apport, l’ensemble de la filière d’éoliennes en Alaska aurait été touché....
N’oublions pas que, même si l’on fait abstraction de ces graves dérives (dont d’autres exemples sont données sur Wikipedia), la neutralité carbone ne conduit aucunement à une diminution des émissions de GES, mais au mieux à une stabilisation. Dans le cadre de l’engagement "Facteur 4" pris par la France, cette solution est donc notoirement insuffisante, d’autant qu’elle semble autoriser les institutions qui y ont recours à fermer les yeux sur la réalité des projets financés. Là encore, il semble urgent de normaliser et labelliser au niveau international les actions entreprises
Auteur : Croissance Verte (Paris)
Croissance-Verte.com est un blog collaboratif qui s’interroge, à travers une revue de l’actualité et des analyses, sur les questions environnementales auxquelles se trouvent confrontées les entreprises (théories économiques, meilleures pratiques, management, communication, règlementations...).