Aujourd'hui, nous sommes habitués à l'abondance. Cependant, notre assurance est trompeuse. Les situations évoluent de plus en plus rapidement : la consommation augmente avec la croissance de la population mondiale ; avec, aussi, l'accès au marché de pays émergents comme la Chine ou l'Inde. En même temps, l'énergie fait question : gaz et pétrole vont se raréfier. Certains pays n'en disposant pas veulent échapper à la dépendance énergétique. Ils cherchent donc à produire des carburants autrement. Pour cela, ils recourent à la transformation de produits agricoles : canne à sucre, betterave, colza, céréales, etc. Ces produits sont donc détournés de leur destination première, l'alimentation. De plus, les terres cultivables se raréfient : elles sont grignotées par l'urbanisation, le bétonnage et le goudronnage d'importantes surfaces. L'érosion accrue par les transformations climatiques les ronge aussi. Enfin, périodiquement, les aléas du climat compromettent des récoltes. C'est le cas, cette année, pour l'Australie, par exemple. Résultat : les stocks alimentaires sont plus bas qu'ils l'ont été ces dernières années. C'est ce qui explique, en partie, l'augmentation des prix de l'alimentation. La question est de savoir si cela va durer et s'aggraver. Il faudra bien faire face. C'est ici que les agriculteurs, les éleveurs, la filière agricole dans son ensemble vont apparaître encore plus nécessaires. Leur rôle nourricier ne sera jamais assez souligné. Il faudra produire plus, alors que, déjà, en France, et dans l'Ouest en particulier, l'effort et les résultats sont remarquables. Certains s'en inquiètent : cette production va-t-elle détériorer davantage encore l'environnement ? Produire autrement À l'évidence, un certain nombre de pratiques ont provoqué d'importantes nuisances. Mais, aujourd'hui, le monde agricole dans son ensemble le sait et s'est mis en mouvement avec courage et détermination. D'abord, pour ne pas accroître la détérioration d'une situation et, en même temps, pour réparer les dégâts. Les réglementations européennes s'imposent à la France avec rigueur. Les autorités de Bruxelles estiment que notre pays a trop tardé à se mettre aux normes. Il est vrai que la densité d'animaux dans certaines zones est trop élevée. Cependant, d'autres pays sont dans le même cas. Or, pour des raisons juridiques, telles que des demandes antérieures de dérogation, ils ne sont pas traités de la même façon... Quoi qu'il en soit, les professions agricoles et les autorités politiques du pays réagissent. Sauf exceptions qui, hélas, existent encore, la plupart des acteurs sont d'accord pour devenir conformes. Mais certains efforts ne sont pas assez reconnus. Parfois, ceux qui n'en font pas bénéficient quand même des aides... Malgré son évolution, la profession agricole reste l'objet de vives critiques, parfois d'attaques : on lui reproche sa lenteur en ce domaine. Or, il faut savoir que les mises aux normes sont difficiles et coûteuses ; qu'elles exigent des changements d'habitudes, des recherches, des constructions d'ensembles industriels de dépollution de l'eau, de récupération et de transformation des déchets. Des organisations, comme celle de la Cooperl, à Lamballe, poursuivent, avec énergie et succès, recherches, développements et investissements en ces domaines. En fait, le ressentiment qui existe entre le monde agricole et les défenseurs de l'environnement est sans doute dû à ceci : la prise de conscience est aiguë de part et d'autre. Mais les uns voudraient voir l'environnement rétabli d'un seul coup dans son intégrité. Or, les autres subissent le poids et le coût de l'adaptation. Il faut bien comprendre que celle-ci est d'autant plus compliquée et onéreuse que, en même temps, il faut continuer à produire. La prise de conscience suscite l'impatience. C'est compréhensible, surtout chez ceux qui, depuis longtemps, avaient donné l'alarme sans être entendus assez tôt. Chez ceux aussi qui avaient tenté de convaincre pacifiquement et qui n'ont pas été assez vite suivis. Cependant, produire autrement ne peut se faire en un jour. Ce qui importe désormais, c'est que, dans le respect mutuel, tout le monde oeuvre dans le même sens pour le bien commun, à court terme comme à long terme. Il s'agit de nourrir, aujourd'hui et demain, les populations d'ici et du monde