La justice belge va reprendre l'instruction de la plainte déposée contre le groupe pétrolier français par des réfugiés birmans pour complicité de crime contre l'humanité lors de la construction d'un gazoduc en Birmanie.
L'avocat de quatre réfugiés birmans, Me Alexis Deswaef, a en effet annoncé ce mardi que la justice belge allait relancer l'instruction contre le groupe pétrolier. Ces réfugiés accusent le groupe pétrolier français de complicité de crime contre l'humanité en Birmanie lors de la construction d'un gazoduc. A partir de 1992, Total a procédé à des investissements considérables pour l'exploitation du champ gazier de Yadana, dans le sud du pays, où il a produit l'an dernier 17,4 millions de mètres cube de gaz par jour, qui alimentent des centrales électriques en Thaïlande. La construction du gazoduc a été un énorme chantier, qui a suscité notamment des soupçons sur l'utilisation éventuelle d'une main d'oeuvre forcée fournie par la junte militaire au pouvoir en Birmanie.
La plainte des réfugiés birmans en Belgique a été déposée en 2002. Elle a d'abord été jugée recevable en 2005 par la Cour constitutionnelle belge. Mais la Cour de cassation a ensuite dessaisi la justice belge car les plaignants n'étaient pas Belges. Avant que la Cour constitutionnelle ne rappelle finalement que, au titre des conventions internationales, un réfugié reconnu avait les mêmes droits de justiciable qu'un citoyen belge.
La procédure devrait donc désormais reprendre. Une perspective sur laquelle Total s'est refusé à tout commentaire aujourd'hui. Interrogé par l'Agence France Presse, le groupe s'est contenté d'indiquer avoir "noté" la relance de cette instruction.
Cette procédure vient en tout cas allonger la liste des déboires que sa présence en Birmanie vaut au groupe français. Ce mardi matin, par exemple, le ministre français des Affaires étrangères Bernard Kouchner a affirmé sur Europe 1 que Total ne serait pas "exonéré" en cas de nouvelles sanctions contre la Birmanie.
La semaine dernière, le président de la République avait déjà lancé un appel au gel des investissements français en Birmanie. Une mesure qui concernerait évidemment Total, même si Nicolas Sarkozy n'a pas demandé un retrait du pétrolier du pays.
Aux Pays-Bas, deux groupes parlementaires de gauche, représentant 58 des 150 députés, ont appelé à un boycottage de Total en raison de sa présence en Birmanie. Et en Belgique, outre l'instruction judiciaire, deux socialistes flamands membres du gouvernement fédéral belge ont demandé au Premier ministre Guy Verhofstadt de mettre un terme au contrat qui fait de Total le fournisseur privilégié des administrations belges.