Suez est dans la dernière ligne droite pour acheter à Acciona 50 % du capital de la société éolienne française, valorisée aux environs de 750 millions d'euros, dette comprise.
Un mois après avoir acheté l'entreprise éolienne canadienne Ventus, Suez est sur le point de remplir la besace de sa division consacrée aux énergies renouvelables d'une nouvelle prise, française cette fois-ci.
Le groupe devrait conclure dans quelques jours l'achat des 50 % détenus par l'espagnol Acciona dans le capital de la Compagnie
du Vent. A la suite d'un appel d'offres piloté par Calyon, qui a reçu plus d'une trentaine de marques d'intérêt, Suez et l'allemand RWE restaient seuls en lice (voir « Les Echos » du 26 octobre).
C'est finalement Suez qui l'a emporté. Pour prendre pied sur le marché éolien français et s'adjoindre le savoir-faire d'une entreprise pionnière de cette énergie, le groupe serait d'accord pour valoriser la société aux environ de 750 millions d'euros, dont une centaine de millions de reprise de dettes.
Fondée en 1989 par Jean-Michel Germa, un ingénieur militant de longue date pour les énergies renouvelables, la Compagnie
du Vent, installée à Montpellier, ne semble pas de prime abord justifier un tel prix. A ce jour, elle exploite une centaine de mégawatts de capacité éolienne installée, réalise 11,3 millions d'euros de chiffre d'affaires et emploie 65 personnes !
Mais les spécialistes de l'éolien expliquent qu'il s'agit d'une des sociétés les plus dynamiques en termes de projets. Interrogé il y a quelques semaines, Jean-Michel Germa précisait que sa société avait 400 mégawatts en projet dans les deux ans à venir et qu'à l'horizon 2015 elle comptait développer au minimum 200 mégawatts par an.
De source bancaire, on souligne que pour construire ces fermes éoliennes, Suez devra renforcer le capital de la Compagnie
du Vent et donc souscrire à une augmentation de capital de l'ordre de 100 millions d'euros. Si bien que la part du fondateur tombera sous la barre des 50 %. Si l'on table sur une capacité installée d'ici à 2015 de 1.700 à 2.000 mégawatts, le chiffre d'affaires annuel de la compagnie tournera alors autour de 300 millions d'euros, calcule un spécialiste.
« Décarboner »
Interrogé hier, le patron de la Compagnie
du Vent n'a pas voulu faire de commentaire, confirmant seulement être en négociation avec Suez. Face à l'envolée des prix dans le secteur, les patrons de ces deux compagnies expliquent que la valeur d'une société éolienne ne se construit pas à partir de son chiffre d'affaires, reflet de son passé, mais sur la base de sa production électrique future, garantie de son avenir. « Rappelez-vous que l'éolien est actuellement la seule énergie disponible et compétitive qui ne pollue pas, et dont la durée de vie est quasi illimitée, puisqu'il y aura toujours du vent. Si bien que, une fois les équipements amortis, il s'agira d'une énergie extrêmement bon marché », observe Jean-Michel Germa.
Avec cette acquisition, Suez, très présent dans l'énergie hydroélectrique avec la Compagnie Nationale
du Rhône et la SHEM
, se met en position de « décarboner » son électricité. En effet, le groupe s'est engagé à offrir un « mix énergétique » mondial à 40 % sans émissions de carbone, grâce au nucléaire et aux renouvelables.
Dans l'éolien, via Electrabel et avant l'achat de Ventus, Suez déclarait exploiter 532 mégawatts en Europe, essentiellement au Portugal, et avoir le triple (environ 1.500 mégawatts) en projet ou en construction. En outre, la Compagnie
du Vent s'intéresse aux centrales solaires et détient les agréments pour la construction d'une unité de fabrication de biodiesel de 200.000 tonnes à Marseille. Celle-ci devrait entrer en fonction en 2009 moyennant un investissement de 55 millions d'euros.