Les exigences environnementales imposent un saut technologique majeur à la construction neuve. Le secteur devra revoir ses procédés, ses matériaux, et ses habitudes. Le bâtiment va devoir faire sa révolution. Le Grenelle de l'environnement lui impose des progrès majeurs en termes d'économie d'énergie. Les logements neufs devront, dès 2012, ne pas consommer plus de 50 kWh/m2/an, alors que la réglementation thermique 2005 autorisait le double.
Le bâtiment va devoir faire sa révolution. Le Grenelle de l'environnement lui impose des progrès majeurs en termes d'économie d'énergie. Les logements neufs devront, dès 2012, ne pas consommer plus de 50 kWh/m2/an, alors que la réglementation thermique 2005 autorisait le double.
Dès 2020, les bâtiments neufs devront être à énergie passive ou positive (c'est-à-dire produire autant ou plus d'énergie qu'ils n'en consomment). " L'appareil industriel risque de ne pas suivre : il n'y a même pas suffisamment de bureaux d'études thermiques ", objecte la Fédération des promoteurs constructeurs.
La rénovation des bâtiments résidentiels est un défi plus grand encore, certains logements anciens dépassant les 450 kWh/m2/an. Le Grenelle s'est bien gardé de fixer de délai ou d'objectif chiffré en la matière.
La Fédération française du bâtiment et EDF prévoient de former 50.000 stagiaires à la rénovation thermique. " Il faudra améliorer considérablement les enveloppes (façades, fenêtres, toitures) des bâtiments et installer des équipements pour récupérer la chaleur, couramment utilisés en Autriche ou en Suisse ", relativise Françoise-Hélène Jourda, une architecte pionnière en la matière.
INDUSTRIALISATION
Mais le développement durable consiste aussi à économiser l'eau, l'air ou les matériaux - ressources non renouvelables. Ce qui implique de repenser la conception des bâtiments en mettant en place des systèmes de récupération des eaux de pluie, d'isolation par l'extérieur ou de ventilation, dits en double flux, qui s'adaptent en fonction de l'occupation des logements. " Il faut aussi penser à l'orientation des terrains, revoir le choix des matériaux pour qu'ils soient à la fois non polluants et aisément recyclables, mais aussi imaginer des ouvrages facilement transformables, en un mot durables ", relève Patrice Genet, le monsieur développement durable de l'Ordre des architectes. " Nous allons devoir revoir nos modes d'approvisionnement et notre façon de réaliser nos chantiers, indique François Massé, président d'Eiffage Construction. Nous envisageons d'industrialiser certains procédés, en réalisant par exemple des ensembles finis que l'on peut poser directement, pour réduire les dépenses énergétiques tout en limitant le recours à la main-d'oeuvre. "
EFFORTS DE FORMATION
Aujourd'hui, les bâtiments peu consommateurs en énergie sont l'exception. En France, une seule maison a été labellisée Effinergie. En Suisse, plusieurs milliers de maisons ont déjà reçu le label équivalent. Or il ne s'agit plus de faire faire quelques bâtiments exemplaires par des équipes pilotes. Toute la filière - des promoteurs aux entreprises en passant par les architectes - va devoir consentir un lourd effort de formation. En juillet dernier, seuls 300 architectes pouvaient, d'après leur ordre, revendiquer une réelle connaissance du développement durable. Les techniques, les enjeux culturels, économiques et sociologiques ne s'inventent pas. Les différentes professions du bâtiment vont aussi devoir travailler ensemble. Installer un capteur solaire sur un toit puis le brancher sur une chaudière requièrent les compétences d'un couvreur mais aussi d'un plombier.
Les majors procèdent aussi àleur aggiornamento. BouyguesConstruction a mis en place une base de données de produits évalués au vu de leur performance environnementale et a formé 45 personnes de ses directions techniques aux nouveaux matériaux et modes constructifs. Le groupe a conçu pour ses commerciaux un logiciel qui permet d'évaluer si un projet peut recevoir lacertification " Habitat et environnement ". Enfin, les compagnons sur les chantiers sont sensibilisés à l'importance que revêtent le traitement des déchets et des eaux usées et les économies d'énergie.
" Le développement durable est un défi. C'est aussi une formidable opportunité pour le secteur de moderniser son image et de trouver des relais de croissance ", conclut Jean-Christophe Visier, spécialiste de l'environnement au Centre scientifique et technique du bâtiment.
SOPHIE SANCHEZ