Tous les partis s'y mettent alors que le sujet était autrefois porté par les Verts. Enfin, le lien est désormais admis entre les enjeux locaux et planétaires. La campagne internationale de l'ancien vice-président américain Al Gore et le débat mené en France par Nicolas Hulot pendant la campagne présidentielle sont passés par là. Le Grenelle de l'environnement, à l'automne 2007, a accéléré le mouvement.
Toutes les municipalités n'ont pas attendu l'emballement général pour se lancer. Lille et Angers font figure de pionnières : elles ont été les premières à mettre sur pied, à la fin des années 1990, un "agenda21" local – un document qui oriente les politiques municipales vers le développement durable. En matière de transport et d'économies d'énergie, Paris et Lyon ont lancé des politiques jugées ambitieuses. Chalon-sur-Saône, qui a mis en place, dès 2002, un programme de réduction des émissions de gaz est citée en exemple.
Autre bonne élève, Nantes, où 41% des déplacements ont lieu en transports en commun, soit le double de la moyenne nationale. Dans de nombreuses agglomérations, le retour du tramway a été le premier pas dans la réflexion sur l'amélioration de l'environnement en ville.
Certains élus ne se cantonnent pas aux transports. Aujourd'hui, par exemple, 10 % des repas servis dans les cantines de Lorient sont bio. La mairie de Château-Thierry met en place des filières courtes d'approvisionnement de ses cantines pour augmenter le revenu des agriculteurs. Besançon s'est spécialisée dans la prévention de la pollution de l'eau… La tendance est au renouvelable. Les projets d'implantation d'éoliennes et de panneaux solaires se multiplient. Perpignan s'est fixé l'objectif de devenir "la première ville française à énergie positive" – elle produira à terme plus d'énergie qu'elle n'en consomme. La construction de bâtiments économes en énergie, voire d'écoquartiers, est en vogue : Angers, Auxerre, Chalon-sur-Saône, Grenoble, Lyon, Narbonne et Rennes ont lancé des projets.
Dans ce foisonnement, difficile de distinguer les vraies inflexions politiques du simple effet de mode ou de communication. "Nous verrons avec le temps si tout cela était sincère ou pas, tempère Sylvain Godinot, chargé du projet "changement climatique" de l'agglomération lyonnaise. Ce qui compte, c'est que les élus intègrent le critère environnemental dans leur politique. On ne peut pas lancer un plan climat, et dans le même temps soutenir un contournement autoroutier." "Comme les entreprises il y a quelques années, certaines collectivités communiquent plus qu'elles ne font", relève Antoine Charlot, responsable du programme territoires durables au Comité21, une ONG chargée d'accompagner les démarches des élus. Il existe 300 "agendas 21" locaux, mais seules 150collectivités ont mis en place une "démarche sérieuse", selon M. Charlot.
"Le critère selon moi, c'est que le maire doit faire mieux avec moins, résume Florence de Monclin, responsable pédagogique à la Fondation Nicolas-Hulot. Moins d'eau, moins d'énergie, moins d'espace urbanisé, moins de perte de biodiversité." Les élus – et les électeurs – ont tendance à plébisciter les réalisations concrètes, inaugurées en cours de mandat. "Pendant longtemps, un bon élu était un élu qui construisait", relève Mme de Monclin.
Est-ce en train de changer? De l'avis général, les élus s'intéressent à l'environnement de façon sincère, mais de là à remettre toutes leurs habitudes en question, il y a un pas. A fortiori dans la mesure où réduire la place de la voiture en ville, cesser l'utilisation des herbicides ou construire un habitat dense moins consommateur d'espace ne sont pas forcément des mesures populaires. "Les politiques disent que la société n'est pas mûre, la société dit que les élus n'avancent pas, lance Mme de Monclin. Il faut cesser de se renvoyer la balle."