À très haute altitude (au-dessus de 4 200 mètres), l'accumulation de neige a peu varié depuis le début du XXe siècle. Mais si les températures estivales augmentent de quelques degrés au cours du XXIe siècle, la fonte pourrait devenir significative et affecter les neiges « éternelles ».
Les glaciers alpins, situés majoritairement entre 2000 et 4000 mètres d'altitude, ont subi une récession très importante au cours du XXe siècle et particulièrement au cours des deux dernières décennies, perdant entre 1 et 1,5 kilomètres de longueur. Au-dessus de 4 200 mètres, il en va différemment.
A l'altitude du Dôme du Goûter (4300 m) ou du sommet du Mont Blanc (4810 m), toutes les précipitations sont solides, sous forme de neige. La fonte du manteau neigeux est très faible et ne se produit que lors d'épisodes rares comme celui de la canicule de 2003. Les variations de masse du glacier ne dépendent que de l'accumulation de neige et de l'écoulement du glacier (la déformation de la glace sous l'effet de son poids) vers le bas.
Afin d'étudier ces variations de masse, les chercheurs(1) ont mesuré les taux d'accumulation de neige depuis 1993 sur le Dôme du Goûter, ainsi que l'épaisseur et la vitesse d'écoulement du glacier. D'autre part, ils ont utilisé les données météorologiques de la station de Chamonix, de 1923 à nos jours, pour en déduire les taux d'accumulation de neige au cours du XXe siècle. Plus précisément, ils ont travaillé sur les précipitations tombées à Chamonix, à 1036 mètres d'altitude, dont ils ont déduit les quantités de neige tombées sur le glacier, et la variation de masse.
À partir de ces différentes données, les glaciologues montrent qu'à ces altitudes extrêmes, l'accumulation de neige est restée quasi-constante depuis 100 ans. Ils montrent en outre, à partir d'anciennes cartes topographiques, que ces petites calottes glaciaires du Mont Blanc et du Dôme du Goûter (son contrefort) ont subi des variations d'épaisseur très faibles, de quelques mètres entre 1905 et 2005. En comparaison, à moyenne altitude (1800 mètres), la Mer de Glace a perdu 120 mètres d'épaisseur dans le même temps.
Les masses glaciaires du Mont Blanc et du Dôme du Goûter n'ont donc pas encore été affectées par le réchauffement climatique. Toutefois, lors d'épisodes climatiques exceptionnels comme lors de la canicule de 2003, la température devenue positive a provoqué un peu de fonte en surface. Si de tels épisodes devenaient plus fréquents, la fusion partielle en surface ne serait plus négligeable et affecterait de façon significative les quantités de neige accumulées. Le caractère « éternel » de ces neiges n'est donc pas garanti à l'avenir.
© C. Vincent, CNRS 2007 (cette image est disponible auprès de la photothèque du CNRS, 01 45 07 57 90, [email protected])
Notes
(1) Laboratoire de glaciologie et géophysique de l'environnement (CNRS/Université Grenoble 1)
Références
Very high-elevation Mont Blanc glaciated areas not affected by the 20th Century climate change, C. Vincent, E. Le Meur, D. Six, M. Funk, M. Hoelzle and S. Preunkert, Journal of Geophysical Research, May 2007.Vol 112, D10