Enfin un côté positif du réchauffement climatique, certes à relativiser et à prendre avec recul. Car c'est la lutte contre ce nouveau fléau des temps modernes qui devrait agir positivement sur la création d'emploi et non le réchauffement lui-même.
Les politiques de lutte contre le changement climatique envisagées par l'Union européenne représentent un gisement important de nouveaux emplois, surtout dans le bâtiment et les transports, au prix d'une "modification substantielle de l'offre et de la demande" et d'un effort de qualification, selon une étude européenne.
Le rapport intitulé "Changement climatique et emploi", présenté mardi à Séville au Congrès des syndicats européens, estime que les mesures visant à réduire les émissions de gaz à effet de serre (GES) de 40% d'ici 2030 seront bénéfiques pour l'emploi du secteur énergétique, celui des transports et celui du bâtiment et de la construction.
Le résultat d'une étude co-financée par l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe) publié récemment estime également que la lutte contre le réchauffement climatique créerait des emplois plus qu'elle n'en supprimerait. Selon les conclusions de l'étude, le gain net d'emploi en Europe grâce à la lutte contre le réchauffement climatique serait de 1,5 %, soit plusieurs millions d’emplois.
Selon le rapport présenté mardi à Séville, le bâtiment pourrait gagner un million d'emplois annuels grâce aux travaux correspondant à une haute qualité énergétique (faible consommation, économies d'énergie), estiment les auteurs qui soulignent également d'autres bénéfices sociaux: insertion des chômeurs de longue durée, allègement de la facture énergétique des ménages...
L'étude de l'Ademe considère sur ce point que si certains secteurs comme la cimenterie ou la sidérurgie pâtiront de la lutte contre le changement climatique, d'autres vont en bénéficier. Le secteur du bâtiment serait le plus grand bénéficiaire d'un tel « phénomène », compte-tenu des travaux d'isolation des habitations nécessités par le bouleversement des saisons.
Le transport recélerait également aussi un "énorme potentiel" de créations d'emplois dans les modes de transports alternatifs. Alors que le secteur emploie aujourd'hui 15 millions de personnes, directement et indirectement (7% de l'emploi européen, essentiellement dans le routier), "20% d'emplois supplémentaires pourraient être créés d'ici 2030 en stabilisant les émissions de GES à leur niveau de 1990" par rapport à un scénario dit "business as usual", sans effort de réduction des GES.
L'étude de l'Ademe estime pour sa part que la production d'électricité ainsi que les transports tireront leur épingle du jeu, grâce notamment aux travaux concernant la recherche pour rendre les voitures plus propres.
La baisse de la consommation d'électricité de l'ordre de 16% provoquerait une perte d'emplois directe de 20% au maximum avec un bénéfice net de plus de 50% pour les énergies renouvelables.
Les auteurs - le cabinet d'expertise Syndex, en liaison avec la Confédération Européenne des Syndicats et plusieurs instituts européens - rappellent que "même un changement climatique modéré, de l'ordre de +2°C, affectera l'activité économique et l'emploi en Europe". "Les gains et les pertes attendus sont d'une ampleur si considérable (qu') aucun secteur ne peut s'abstraire des conséquences du changement climatique", assurent-ils.
"L'enjeu est de transformer l'industrie telle qu'elle existe aujourd'hui, avec comme stratégie le renforcement de l'efficacité énergétique, ne pas écarter le nucléaire et développer les différentes sources d'énergie renouvelables", a estimé le représentant de la CGT à Séville, Jean-Christophe Le Duigou, soulignant néanmoins qu'il "ne faut pas imposer le même choix à chaque pays".
Globalement, selon l'étude, les emplois liés à la production d'électricité devraient glisser vers les activités liées à l'efficacité énergétique et aux économies d'énergie; ceux attachés aux transports routiers (marchandises et passagers) vers les transports publics (notamment rails et voies navigables pour le fret); et les postes liés à la construction d'équipements et la production d'énergies à partir de combustibles fossiles vers les filières d'énergies renouvelables, l'efficacité énergétique, "voire le nucléaire".
Ces transferts supposent une "augmentation de la demande de travailleurs de plus en plus éduqués et qualifiés", note l'étude.
Mais "il est crucial que les secteurs potentiellement gagnants (...) évoluent positivement sur le plan social" afin que les emplois qu'ils proposent ne soient pas perçus comme moins stables ou moins bien payés, insistent les auteurs.