Par Line Rifai
Le paquet de pâtes, produit alimentaire populaire par excellence, risque-t-il de devenir un produit de luxe ? Après des années de baisse du prix réel des pâtes sèches - le prix du paquet de Panzani n’ayant pas changé depuis dix ans malgré l’inflation, selon Xavier Riescher, PDG de la marque - la tendance est en train de s’inverser. «Le blé dur, base quasi exclusive des pâtes alimentaires, connaît une situation préoccupante sans précédent depuis plus de vingt ans. Son prix a subi une augmentation de 40 % en l’espace de quelques semaines ce qui se traduira par une forte augmentation du prix des pâtes», s’inquiète le Syndicat des industriels fabricants de pâtes alimentaires de France (Sipaf).
«Ne pas livrer». « Nous pratiquerons une hausse des prix, mais après concertation avec nos partenaires commerciaux», confirme Elisabetta Iourcev, porte-parole de Barilla, leader mondial. «C’est la première fois que les producteurs préfèrent ne pas livrer [les hypers] si la grande distribution n’accepte pas leurs hausses de prix», renchérit Xavier Riescher. Contrairement aux autres produits alimentaires, les pâtes sont peu transformées et la hausse des matières premières se répercute directement sur le prix. «La matière première pèse jusqu’à 50 % dans le prix de revient. Quand le prix du blé dur augmente de 40 à 50 %, le prix de revient subit une hausse de 12 à 20 %. Il n’y a pas une société au monde qui peut supporter une telle baisse de marge», explique Franck Rouard, le PDG d’Alpina Savoie, une marque de pâtes régionales.
La grande distribution va-t-elle se montrer compréhensive ? «Il n’y a pas de raison de laisser aux seuls industriels la nécessité d’amortir ces hausses sur leurs marges», reconnaît Michel-Edouard Leclerc, le PDG de l’enseigne de grande distribution, mais nuance : «Les transformateurs demandent des hausses de l’ordre de 10 à 15 %. Nous allons faire jouer la compétition entre les producteurs européens de pâtes. Au final, la hausse devrait être de 5 à 6 %.»
Pas optimiste. Producteurs et distributeurs ne sont pas non plus d’accord sur la nature de cette hausse. Pour Leclerc, elle est conjoncturelle et ne devrait pas durer. Mais Franck Rouard est beaucoup moins optimiste. «Il n’y a aucune raison pour que cette tendance à la hausse des prix s’inverse», estime-t-il.