Malgré un léger découplage entre la croissance et la pollution depuis les années 90, la Chine doit faire face à une situation écologique préoccupante dans tous les secteurs. Le cadre réglementaire est en place mais son application reste difficile.
Dans le cadre de sa mission d'appui aux politiques gouvernementales de ses Etats membres, l'organisation de coopération et de développement économique (OCDE) est amenée à examiner la situation environnementale de ces pays au regard de leurs objectifs nationaux et engagements internationaux dans ce domaine. Dans le cadre du deuxième cycle d'étude, l'OCDE s'est penché cette fois-ci sur la Chine.
Avec sa superficie de 9,6 millions de km2 qui représente 7% des terres émergées du globe et une croissance de l'ordre de 10% par an, la Chine figure parmi les plus grands pays du monde et est à l'heure actuelle la quatrième puissance économique mondiale. Mais l'industrialisation et l'urbanisation qui en découlent exercent de fortes pressions sur l'environnement. Selon le rapport de l'OCDE, la Chine a su néanmoins définir un cadre réglementaire et législatif moderne et complet (…) où est inscrite l'action en faveur du développement durable et de l'environnement. L'OCDE rappelle par exemple qu'en avril 2006, lors de la 6e réunion nationale sur la protection de l'environnement, le Premier ministre chinois avait annoncé trois nouvelles orientations, incluant l'intégration sur un pied d'égalité des décisions de protection de l'environnement et des décisions économiques, un meilleur découplage des émissions de polluants de la croissance économique, et l'utilisation d'une panoplie d'instruments pour répondre aux problèmes environnementaux.
D'ailleurs, selon l'organisation internationale, le taux de croissance moyen du PIB à deux chiffres de la Chine s'est accompagné, au cours de la période 1990-2005, d'un certain découplage de la pollution et de l'essor économique. Ce fut notamment le cas pour les émissions de SO2 et récemment de NOx. L'intensité énergétique a diminué de moitié à peu près depuis 1990 et les prélèvements d'eau et la production de déchets municipaux ont eux aussi été sensiblement découplés de la croissance économique.
Cependant, l'OCDE estime que ces efforts ne sont pas suffisants au regard de la croissance. Globalement, les actions de sauvegarde de l'environnement manquent d'efficacité et d'efficience en grande partie à cause d'une mise en oeuvre défaillante. C'est à l'échelon local que la politique de l'environnement semble rencontrer le plus d'obstacles : comme les dirigeants locaux ont des objectifs de résultats, qu'ils doivent dégager des recettes localement pour exécuter des missions et qu'ils ne sont pas véritablement tenus de rendre des comptes aux populations locales, les priorités économiques prennent en général le pas sur les préoccupations environnementales.
Résultat, l'économie chinoise reste très polluante et continue de consommer beaucoup d'énergie, de matières et d'eau. L'intensité énergétique de la Chine, par unité de PIB, est supérieure de 20% environ à la moyenne de l'OCDE. Bien que le taux de motorisation demeure faible, le nombre de véhicules a doublé dans la deuxième moitié des années 90 et la circulation des véhicules à moteur représente d'ores et déjà la principale source de pollution de l'air en zone urbaine. D'ailleurs, sur les vingt agglomérations les plus polluées du monde, seize sont chinoises. De nombreux cours d'eau, lacs et eaux côtières sont gravement pollués par les rejets de l'agriculture, de l'industrie et des ménages. Les quantités de déchets municipaux, industriels et dangereux sont de loin supérieures aux volumes qui peuvent être traités et éliminés. Certains de ces déchets sont stockés en attente de traitement ou sont mis en décharge sans contrôle. De plus, les accidents impactant significativement l'environnement sont fréquents.
Face à ce constat alarmant, l'OCDE invite la Chine à redoubler d'efforts pour améliorer l'environnement dans l'optique d'une croissance économique durable. L'organisation recommande surtout de renforcer l'efficacité et l'efficience de la politique de l'environnement par la mise en oeuvre sur tout le territoire des lois et réglementations environnementales applicables aux produits et aux installations industrielles/énergétiques. L'OCDE propose également à la Chine d'accentuer le principe pollueur-payeur, d'accroître les investissements dans les infrastructures et appelle les instances de l'État et les collectivités territoriales à diversifier les sources publiques et privées de financement au service de l'environnement. Le rapport plaide également pour que le gouvernement aille plus loin dans la coopération internationale en la matière. Le rapport souligne qu'un rééquilibrage écologique serait bénéfique pour la Chine tout en ayant valeur d'exemple pour d'autres pays.
La publication de ce rapport de l'OCDE intervient après que la banque mondiale a sorti une étude sur la pollution en Chine et ses conséquences sanitaires. Mais selon le Financial Times le gouvernement chinois aurait obtenu le retrait partiel de ce rapport craignant que certaines révélations ne provoquent des tensions sociales. Selon l'étude environ 750.000 personnes décèdent prématurément chaque année dans le pays, principalement en raison de la pollution atmosphérique dans les grandes villes. Intitulé « Le Coût de la pollution en Chine », le rapport ne serait pas encore officiellement paru car la Banque mondiale serait toujours en discussion avec le gouvernement chinois mais une version téléchargeable est disponible sur internet.
F.ROUSSEL-LABYTélécharger le rapport de la Banque mondiale