Le niveau limité accordé par Bruxelles à la Pologne lundi donne un signal fort sur l'organisation de la pénurie de quotas de CO 2 entre 2008 et 2012.
Les quotas de CO2 déjà alloués en Europe
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Sans surprise pour la France, qui avait déjà revu une fois sa copie, le nombre de quotas accordé à la Pologne et à la République tchèque s'avère inférieur aux attentes. Pour la Pologne, qui produit 95 % de son électricité à base de charbon et émet donc beaucoup de CO2, la contrainte s'avère particulièrement ambitieuse : à 208,5 millions de tonnes de CO2 par an, le nombre de quotas dont disposera le pays est inférieur de 27 % à ce qu'il demandait. " La décision sur la Pologne était une décision clé. Les Polonais avaient demandé beaucoup trop de quotas ", constate Mark Lewis, analyste à la Deutsche Bank, qui estime que la Commission a donné un signal fort quant à la création d'une pénurie de quotas. Ces plans de quotas qui seront ensuite distribués à 11.400 sites énergo-intensifsexpriment la répartition, par pays, de l'engagement de l'Europe des 25 à réduire de 8 % les émissions de CO2 entre 1990 et 2012.
MANQUE DE TEMPS ET DE MOYENS
Alors que la répartition des quotas est désormais déterminée pour 17 pays sur 27, dont les principaux pays émetteurs de CO2, c'est-à-dire l'Allemagne, le Royaume-Uni et la Pologne, la visibilité s'améliore. Le nombre de quotas est un des fondamentaux majeurs du marché de la tonne de CO2, avec la croissance économique et les températures, qui peuvent tous deux influencer les émissions réelles de CO2. La Commission a également encadré la possibilité de recourir au marché des crédits de CO2, en provenance des pays en voie de développement : la France et la Pologne ne pourront pas avoir recours pour plus de 10 % de leurs besoins. Une fois la pénurie organisée, la demande de quotas devrait donc progresser : d'ici à 2008, les industriels n'ont ni le temps ni les moyens d'investir dans des centrales moins polluantes. Ils devront donc soit changer de carburant, en passant du lignite au charbon ou du charbon au gaz, ou avoir recours au marché des quotas. Selon Mark Lewis, la tonne de CO2 devrait grimper vers les 25 euros en 2010. Un prix qui risque d'avoir un impact important sur le prix de gros de l'électricité, qui reflète le coût de production le plus élevé du parc des électriciens. Selon la Deutsche Bank, l'effet inflationniste sur l'électricité serait alors compris entre 3 et 6 euros par mégawatt/heure.
Et les coûts de " décarbonisation " de l'économie européenne ne s'arrêtent pas là. Selon le cabinet McKinsey, qui vient de sortir une étude intitulée " Une courbe de coûts pour la réduction des gaz à effet de serre ", l'objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre de 20 % d'ici à 2020 devrait coûter 1.100 milliards d'euros à l'Europe.
Publié dans La Tribune - 28/03/07
ALINE ROBERT