Les agriculteurs et les producteurs en font tout un foin. La distribution ne veut pas en entendre parler. Bercy veut limiter la casse du côté du pouvoir d’achat. Bref, la flambée des cours des matières premières agricoles (blé, maïs, orge.) depuis plus d’un an fournit les ingrédients pour d’âpres négociations entre les professionnels du secteur.
Du grain à moudre pour la filière agroalimentaire
Par Laureen Ortiz
Ils s’étaient réunis, hier matin, pour discuter d’une hausse des prix des produits alimentaires, quelques heures avant une table ronde à Matignon. En première ligne : le lait, le chocolat, les céréales, la viande. en somme, tous les produits peu transformés dont la part des matières premières agricoles est élevée.
Malgré les divergences, «il y a unanimité pour dire qu’une répercussion sur les prix est inévitable dans les prochaines semaines», a annoncé Jean-Michel Lemétayer, président de la FNSEA, principal syndicat d’agriculteurs, à l’issue de la rencontre. Les participants - la FNSEA, l’Association nationale des industries alimentaires (Ania), la Fédération des entreprises du commerce et de la distribution (FCD) - ont pris acte d’une «situation nouvelle» : depuis 2006, le cours mondial du blé a augmenté de 55 %, celui de l’orge de 45 %, celui de la poudre de lait de 60 %.
Saucisses. «Le pire serait d’ignorer le marché», affirme Lemétayer. Car si les producteurs sont loin de se plaindre de l’aubaine, qui a dopé leur revenu de 16 % en 2006, le problème est la survie de certaines filières, comme l’élevage d’animaux. «60 % des coûts de production de la viande de porc vient de l’alimentation des bêtes», composée essentiellement de céréales, rappelle Jean-Michel Serres, responsable de la Fédération porcine.
Comment alors le jambon et les saucisses pourraient-ils échapper à une hausse des prix ? Les entreprises de marques alimentaires, du type Bonduelle, nuancent. «Nous voulons des hausses minimales, pour ne pas voir les consommateurs se détourner de ces produits, mais elles sont nécessaires à la survie des filières», a expliqué Jean-René Buisson, président de l’Ania.
Marges. «On espère que les négociations aboutiront vite», s’inquiète Serres, pour qui la solution réside dans l’effort qu’est prête à fournir la grande distribution sur ses marges. Mais les hypers, eux, jouent comme d’habitude leur carte. «Nous sommes attachés à notre image de prix, a souligné Jérôme Bédier, président de la FCD. Il faut distinguer les hausses justifiées de celles qui ne le sont pas.» D’autant que la ministre de l’Economie, Christine Lagarde, a prévenu qu’elle surveillerait «de très près» les répercussions de la hausse des cours sur les prix. Et Leclerc de qualifier d’ «alarmistes» ces appels à la hausse.