Rien n’a changé depuis Edison, tout a changé depuis Bell ». La comparaison entre les réseaux électriques et les réseaux télécoms peut paraître singulière. Néanmoins, la convergence des deux mondes offre de nouvelles perspectives aux gestionnaires de réseaux électriques mais aussi à tous les acteurs du marché de l’électricité.
De nouveaux défis qui nécessitent des investissements
Augmentation de la demande en électricité, développement des énergies renouvelables, diffuses et intermittentes, arrivée des véhicules électriques, autant de défis que le secteur de l’électricité doit aujourd’hui relever. Ces nouveaux usages impactent fortement les réseaux électriques. L’appel de puissance dû à des demandes massives de charge rapide des véhicules électriques à la pointe de 19h nécessiterait à lui seul de doubler le réseau électrique actuel. Ces mutations ajoutées à la demande pressente de restaurer la qualité de fourniture créent un besoin d’investissement en infrastructure énorme. Les réseaux intelligents apparaissent comme un investissement indispensable pour réduire la facture globale à long terme. Pour autant, il ne faut pas arrêter tout investissement sur le réseau physique au profit du système informatique et télécom nécessaire aux smart grids. C’est du dosage judicieux de l’un et de l’autre que dépendra l’optimisation des efforts nécessaires pour disposer d’un système électrique à la hauteur des défis et des attentes.
Une démarche de transformation progressive
La modernisation du système électrique doit s’effectuer progressivement par avancées successives à partir des réseaux existants et au rythme des priorités. Aujourd’hui, les choix européens et français ont amené à se concentrer sur le compteur communicant, brique essentielle des réseaux intelligents. Si le compteur communicant améliore la qualité du service fourni au client avec un traitement plus rapide et à distance des demandes et une facturation basée sur la consommation réelle, il offre également une meilleure visibilité des incidents sur le réseau et des signaux tarifaires permettant de lisser la courbe de charge et de créer des capacités d’effacement.
L’actualité récente montre la nécessité d’expliquer et de concerter avec toutes les parties prenantes : consommateurs professionnels et résidentiels, concédants, régulateur, fournisseurs, gestionnaires de réseaux, etc. pour obtenir l’adhésion et l’implication de tous et faciliter le développement des smart grids.
Un effort structuré pour une filière industrielle forte
Le nombre et la diversité des parties prenantes ainsi que les échelles de temps à considérer font de l’interopérabilité un défi en soi. Quand chaque segment de la chaine électrique (production, transport, distribution, véhicule électrique …) poursuit sa transformation, la structuration de ces efforts est fondamentale pour s’assurer de la capacité des différents systèmes connectés à communiquer. Pour cela, il faut s’inspirer de la dynamique américaine et mettre en place une filière industrielle forte. Une longue expérience du contrôle de la demande, avec notamment les tarifications heures pleines/heures creuses et EJP, des compétences pointues dans les différents domaines et des réseaux en relativement bon état sont les atouts qui permettront à la France et à l’Europe de prendre à son profit la tête de la marche vers les réseaux intelligents.
Par Grégory Jarry, consultant senior Colombus Consulting