Par Nic Cantuniar, VP Europe de Cable&Wireless Worldwide
Les réseaux électriques n’ont quasiment pas évolué depuis leur mise en place, il y a plus de 100 ans. Dans ces conditions, comment ces systèmes qui entrent en désuétude vont pouvoir répondre aux nombreuses problématiques rencontrées aujourd’hui par le marché de l’électricité : augmentation de la demande énergétique, diminution des ressources disponibles, protection de l’environnement et intégration des énergies renouvelables ?
La création du réseau de distribution d'électricité intelligent
Pour répondre à ses questions, les pouvoirs publics, les organismes de réglementation, les compagnies de distribution et les entreprises technologiques envisagent de créer un « réseau de distribution d'électricité intelligent », également appelé Smart Grid, qui devrait regrouper, coordonner et superviser l’offre et la demande d’électricité de façon globale.
L'an dernier, le « package télécom » européen est officiellement entré en vigueur avec pour objectif la création d’un marché énergétique européen intégré, première étape vers un réseau de distribution intelligent [1]. Les directives s'appliquant au marché du gaz et de l'électricité imposent aux états membres de L’Union Européenne d’instaurer des « systèmes de compteurs intelligents » favorisant la participation active des consommateurs. Il est prévu que 80 % des ménages en Europe soient équipés avec ce type d’appareil d'ici 2020 et que tous en soient dotés en 2022.
L'installation de compteurs intelligents capables de surveiller la consommation d'énergie et de revendre l'éventuel surplus au réseau de distribution constitue la première étape vers le déploiement un réseau intelligent européen. En France, le Ministère de l'Ecologie, de l'Energie du Développement Durable et de la Mer a publié, le 2 septembre 2010, un décret prévoyant l’installation de ces compteurs intelligents dans les foyers français à partir de 2012. L’appareil est d’ores et déjà testé à Tours et à Lyon.
Le futur réseau intelligent utilisera le numérique pour surveiller l'approvisionnement électrique affluant dans le réseau et contrôler, en même temps, la demande des consommateurs - y compris pour les appareils électroménagers - avec les objectifs suivants : économiser l'énergie, réduire les coûts et accroître la fiabilité de l'alimentation. Pendant les heures creuses, les utilisateurs pourront, grâce au réseau intelligent, mettre en marche certains appareils domestiques, comme une machine à laver ou des machines-outils, dans les usines. Durant les pics de consommation électrique, on peut, au contraire, éteindre ces appareils pour réduire la consommation.
Un réseau intelligent utiliserait, en outre, des lignes supraconductrices pour renforcer l'efficacité du transport, améliorer la faculté de stockage de l'électricité non-consommée et la distribuer au cours de périodes de forte demande. La capacité de stockage constitue une caractéristique importante dans la gestion des fluctuations de l'énergie produite par les ressources solaires et éoliennes. Voilà qui constitue un avantage fondamental pour permettre une bonne adaptation aux énergies renouvelables.
Les perspectives de ce secteur sont florissantes. Ce type de réseau électrique modernisé est promu par de nombreux États comme un moyen de résoudre les problèmes d'indépendance énergétique, de réchauffement climatique et de résilience aux pannes.Le développement d’un réseau intelligent est aujourd’hui promu par de nombreux gouvernement comme une solution permettant indépendance énergétique mais aussi de lutter contre le réchauffement climatique et d’améliorer la résilience du réseau. Ainsi, selon SBI Energy, le marché mondial du réseau intelligent devrait augmenter de 150 % entre 2009 et 2014, atteignant 171 milliards de dollars d'ici 2014.
Le « super-réseau intelligent » européen comme d'autres propositions précédentes (telles que le réseau intelligent unifié continental d'Al Gore) a pour objectif une interconnexion des réseaux à l'échelle nationale et internationale sans qu’une panne localisée puisse affecter l’ensemble.
Il n'y a aucun doute sur les avantages d’un réseau intelligent : baisse de la consommation d'énergie, respect de l'environnement, économies pour les entreprises et les particuliers, source de revenus pour un large éventail d'entreprises du secteur de l'informatique et des télécommunications. Il est donc clair que cet outil s’avère bénéfique pour les particuliers comme pour les entreprises.
Un réseau quasi-illimité
Voilà pour les bonnes nouvelles. Si le réseau intelligent est doté d'un potentiel quasi-illimité, sa complexité l'est presque tout autant. Ce projet, qui suppose ni plus ni moins que de redéfinir la manière dont les pays alimentent entreprises et foyers en électricité, pourrait facilement s'enliser en raison de priorités divergentes, d'un attentisme des pouvoirs publics et d'un mode de pensée trop traditionnel.
Alors que de nombreuses discussions portent sur le « réseau intelligent », il semble y avoir quelques hésitations quant à sa mise en place concrète. L'infrastructure devra dépendre de la communication, rendant les Technologies de l'Information et de la Communication (TIC) essentielles à son développement et à son installation : le plus grand obstacle.
La création du réseau intelligent sera sans aucun doute un projet s'étalant sur plusieurs années avec un parcours semé d'embûches. Parmi les protocoles qui piloteront le réseau intelligent, beaucoup sont bien connus, comme l'Internet Protocol (IP) et 802.15, la référence en matière de réseau personnel sans fil. Malgré tout, des protocoles et des normes spécialisés devront être créés et fonctionner comme un réseau maillé coordonné et interdépendant. Ce type de réseau, pour la majeure partie, n'existe pas encore.
Le réseau intelligent, comme son nom l'indique, est un nouveau système électrique plus intelligent qui associera les TIC et les sources renouvelable d’énergie afin d’améliorer la manière dont l'électricité est produite, fournie et consommée. Il apportera une information en temps réel aux compagnies de distribution, leur permettant de gérer un réseau électrique entier comme un système intégré unique. Ainsi, les entreprises pourront détecter et répondre aux modifications intervenant dans la demande en énergie, l'alimentation, les coûts et les émissions, et ce, des panneaux solaires jusqu’aux parcs éoliens en passant par les usines à forte consommation d'énergie.
Les conditions de création du réseau sont primordiales au bon fonctionnement des divers outils utilisés dans le réseau intelligent : capteurs, moniteurs, appareils de communication, etc. En se reportant à la manière dont les problèmes rencontrés dans le réseau intelligent ont déjà été résolus dans le secteur des télécommunications, il est possible pour les entreprises d'en tirer des leçons.
Les racines du secteur des services publics nous éclairent sur les mesures nécessaires pour relever une grande partie des défis posés par la mise en place d'un réseau intelligent. Ils comprennent les aspects suivants : interaction, efficacité optimale, facturation seconde par seconde, surveillance des systèmes en temps réel, visibilité de l'infrastructure jusqu’au niveau du moindre nœud et sécurité. Beaucoup d'entre eux ont déjà été abordées par le secteur des télécommunications et peuvent être mis à profit pour le développement de ce réseau intelligent.
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[1] Un réseau intelligent est composé d’un système de supervision intelligent gérant l'ensemble de l'énergie affluant dans le système. Il comprend aussi l'utilisation de lignes de transmission supraconductrices réduisant les pertes de puissance ainsi que la capacité d'intégrer de l'électricité renouvelable comme le solaire ou l'éolien.
