La première plante transgénique fut un tabac résistant à un herbicide, créée en 1983.
http://bhrumeur.blog.lemonde.fr/2007/06/26/tabac-ogm-et-environnement/
Tabac, OGM et environnement?
En fait, c’est une question que je ne m’étais jamais posée… Et voilà: il y a quelques jours que je cogitais là-dessus… Me demandez pas pourquoi… Suite aux décisions récentes du gouvernement en matière d’OGM peut être… Quoi qu’il en soit, je me demandais donc ce qu’il en était de l’usage des OGM dans les plants de tabac. Parce que l’on sait déjà que ce n'’est pas bon, mais si en plus cela contient des OGM, c’est le pompom! Et adieu les grands discours pipes ou clopes au bec en disant qu’on est libre: déjà que le tabac représente le summum de la dépendance (et je ne blâme pas, j’ai fumé par le passé!), mais si en plus on se dit écolo, manger bio mais fumer des clopes aux OGM, là cela me ferait vraiment rire… Du coup, je me suis renseignée..:-)
Et ce n’est pas de la morale que je veux faire ici, mais si les preuves sont convaincantes (malheureusement) sur le sujet, peut être que cela donnerait un argument de plus à ceux qui ne savent pas comment s’en défaire… Sachant qu’un smicard fumant un paquet par jour grille entre 30 et 40% de son budget dans cette saleté en plus… Sachant aussi quels sont les effets de la cigarette sur l’environnement…
En fait, lorsque l’on effectue de petites recherche sur le sujet, il y a deux choses qui frappent: d’une part il n’y a pas énormément d’informations (mais je n’ai peut être pas suffisamment cherché!), mais en plus les seules choses que l’on trouve sont plutôt positives… Voyez donc ma stupéfaction hein..
Surprise…
Le dernier article en date que j’ai trouvé sur le sujet a été écrit par Hervé Morin et publié le 21 février dernier dans le Monde. Intitulé “un tabac OGM pour fabriquer des molécules thérapeutiques”, il met en avant l’idée d’une start-up française crééé en 2003 (Librophyt SA) ayant pour but d’utiliser le tabac pour lutter contre le cancer… Pour cela, elle venait de demander une autorisation de “procéder à des essais en champ d’une version transgénique de cette plante. Ce tabac a été génétiquement modifié pour produire une molécule de la famille des diterpénoïdes, proche des célèbres Taxol et Taxotère, utilisés dans la lutte contre les cancers du sein et de l’appareil génital féminin.“
La demande d’autorisation de culture faite par cette société prévoyait de réaliser un essai “sur une surface de 1 hectare (…) dans la commune d’Allemanche (Marne), à partir de début avril. Il devrait permettre de produire 100 grammes de principe actif, synthétisés au niveau des feuilles de la plante, à laquelle deux gènes d’if ont été «greffés».” Cette demande a semble-t-il été autorisée le 21 mars dernier. Alain Tissier, le créateur de Librophyt SA, ancien chercheur au Commissariat à l’énergie atomique (CEA) à Cadarache (Bouches-du-Rhône), doit être content! Son objectif, comme le précisait l’article du Monde, “étant de vérifier le bon rendement de ces «usines» à molécules, si d’aventure elles devaient produire un jour de grandes quantités de médicaments. Et de rassurer les investisseurs quant à la stratégie poursuivie“…
Pour les détails techniques du détournement génétique opéré, voir l’extrait concerné de l’article en fin de post. Mais il faut surtout retenir que la société a en réalité détourné les glandes présentes dans le tabac sauvage, Nicotania Sylvestris, afin de produire non pas des molécules à vocation thérapeutique, mais pour la parfumerie… Cette forme de tabac diffère du tabac à fumer et ne contaminerait pas les variétés alimentaires. Mais comme on le trouve ici, les mesures de précaution habituelles sont toujours préconnisées, alors tout de même… Cela veut bien dire quelque chose… Puis lorsqu’on lit ça aussi (même si ce n’est pas facile à lire), on se pose tout de même quelques questions…
Histoire du tabac génétiquement modifié…
Enfin, au-delà de cet article et des effets bénéfiques du tabac… on apprend facilement que la première plante transgénique fut un tabac résistant à un herbicide, créée en 1983. Ensuite, en 1986, le premier essai en champ était pour un tabac résistant à un herbicide. Il a eu lieu en même temps aux USA et en France (SEITA). En 1994, c’est aussi un tabac résistant à un herbicide qui est également le premier OGM commercialisé en Europe pour la production de semences… On s’aperçoit aussi dans cet article datant de 1999 que la “Chine a été le premier pays du monde à cultiver et à commercialiser des plantes transgéniques, en 1988, plusieurs années avant les fermiers américains et huit ans avant la création d’une commission de l’ingénierie génétique à Pékin!” Mais parmi les cultures génétiquements modifiées, alors que le cadre légal était très embryonnaire, “le tabac génétiquement modifié recouvrait en 1996 la surface incroyable de 1,6 million d’hectares, selon l’International Service for the Acquisition of Agri-biotech Applications. Sans même apparaître sur la liste des produits approuvés! «Les plants de tabac transgéniques devenaient plus sensibles aux bactéries», explique Guo Jing Quan, directeur technique de Rhône- Poulenc à Pékin. En 1997, incapables d’obtenir des garanties de fiabilité, les multinationales ont interrompu leurs importations de feuilles de tabac chinois“… Sûr, car “contrairement aux Européens, pour la majorité des Chinois, il n’y a rien d’immoral dans la transgénose. La nature a des règles que l’homme peut transformer“, expliquait alors le Professeur Zhu Zhen, du Laboratoire de manipulation génétique des plantes… Il serait intéressant de savoir ce qu’il en est vraiment aujourd’hui… Voir si ce que les semenciers ne peuvent faire chez eux n’a pas été fait en Chine…
Mais il faut retenir surtout que ce détournement génétique a été opéré par l’industrie du tabac de manière intensive “afin de la rendre résistante à certains produits, plus chargée en nicotine, et comportant naturellement certains produits nocifs, servant la cause de ces géants commerciaux et bien entendu, dont le rajout en industrie était interdit.” Et la recherche continuerait, “avec un plant de tabac appelé Y-1, fruit de 40 ans de recherche intensive (…) alors que le plant est en ligne de mire de la Food and Drugs Administration” (source).
Effet de la cigarette sur l’environnement
Mais en poussant le vice plus loin, on peut aussi se poser la question des effets de la clope sur l’environnement, au delà de la culture OGM… En fait, 75 % du tabac mondial est cultivé dans les pays en développement. Cette stratégie est avant tout financière: cette culture est plus rentable que les cultures vivrières traditionnelles, pourtant essentielles, notamment en Afrique. “Et une fois récoltée, la plante doit être séchée avec les moyens du bord: des arbres sont coupés puis brûlés en très grande quantité. Il faut un hectare de bois pour sécher un hectare de tabac. La cigarette consomme aussi du papier, à un rythme impressionnant: les machines actuelles peuvent utiliser jusqu’à 6 kilomètres de papier à cigarette par heure.“ Et ce n’est pas tout: “une cigarette, avant combustion, contient plus de 2500 composants chimiques plus ou moins naturels, parfums et arômes pour l’essentiel. Son empaquetage ne fait pas non plus dans la légèreté. Un film de plastique ou d’aluminium, un emballage carton, un film de cellophane… Le produit est prêt. Ses composants ont parcouru des dizaines de milliers de kilomètres avant d’atterrir en Europe ou aux Etats-Unis. Elles y dissémineront, en se consumant, 4 000 substances et termineront leur cycle à l’état de mégot. Lequel, jeté dans la nature, mettra près de douze ans à disparaître.“…
Allez, on continue un peu pour la suite…? Une étude de chercheurs italiens datant de 2004 a montré que la fumée d’une cigarette pollue autant l’air que 10 voitures diesel. En comparant la quantité de particules en suspension contenues dans les gaz d’échappement d’une voiture diesel et celle dans la fumée produite par une cigarette, il sont montré que 3 cigarettes, brûlées l’une à la suite de l’autre (de telle sorte qu’à tout instant t de l’expérience, une seule cigarette se consumait) ont produit une augmentation des particules polluantes dans l’air dix fois supérieure à celle produite par une automobile diesel tournant au ralenti pendant le même laps de temps. Je vous conseille de lire le résumé de l’étude donc… Certains y verront la propreté de certains moteurs diesel, mais selon Ivan Vince, un expert de la pollution de l’air, “la plupart des substances chimiques émises par la cigarette ont une brève durée de vie et elles affectent essentiellement l’environnement local. Par exemple, les aldéhydes endommagent les plantes, les yeux des êtres humains et leurs voies respiratoires. L’oxyde nitrique, aussi produit par la fumée de tabac, est le principal responsable de la formation d’ozone dans les villes.“…
Santé publique et liberté de choix
Alors tout ça doit interroger un minimum… Non? Je me souviens en écrivant cela à ce petit post d’Isabelle sur les liens entre nourriture et liberté qui a du m’inspirer un peu ici aussi… Car, certes, être écolo n’est pas facile, certes on ne peut manger bio tout le temps (et puis bientôt cela voudra dire quoi ‘manger bio’ si les lobbies nous mettent des OGM dedans?), certes il y a plein d’efforts difficiles à effectuer tant les politiques publiques ne sont pas adaptées (dans le centre ville de Bordeaux par exemple, le tri sélectif n’existe pas encore! Juppé peut bien se vanter mais en attendant les poubelles ne sont pas triées!), mais en terme de cigarettes, il s’agit tout de même d’un choix délibéré, d’une liberté que l’on perd par force d’accoutumance, d’une drogue que les lobbies entretiennent minutieusement depuis le début… Fumer n’est pas un besoin vital à l’origine. C’est une envie sociale, une dépendance créée de toute pièce par les lobbies. Quelle crédibilité peut-on réclamer alors si au niveau individuel on n’est pas capable de refuser une telle machination?
Bref, la question est posée… Mes recherches ici sont sûrement incomplètes et encore de surface… Mais il y a une part de vrai quand même.. Je ne vise bien sûr personne, si ce n’est les lobbies… Il ne faut pas m’en vouloir et que les fumeurs ne m’incendient pas, mais cela me travaille en fait… Je ne donne pas vraiment de conclusion mais comme moi vous n’en penserez peut être pas moins! Enfin, j’espère…
Pour approfondir:
Pourquoi le tabac est attrayant comme OGM, c’est ici (en anglais)
Source de l’étude italienne: G. Invernizzi, A. Ruprecht, R. Mazza, E. Rossetti, A. Sasco, S. Nardini, R. Boffi Particulate matter from tobacco versus diesel car exhaust: an educational perspective Tobacco Control 2004;13:219–221
Détails donnés dans l’article d’Hervé Morin sur la manipulation génétique de la société Librophyt:
“A l’origine, Librophyt espérait pouvoir faire produire par la plante un des précurseurs directs du Taxol et du Taxotère, actuellement extraits de l’if. Mais il est apparu que la synthèse par cet arbre de ce composé était bien plus complexe que prévu, et qu’elle impliquait de nombreux gènes dont plusieurs restent à découvrir.
La jeune société s’est donc recentrée sur la production par le tabac de précurseurs moins complexes, des taxanes, pour les confier à des chimistes afin que ceux-ci leur adjoignent des « fonctionnalités » par synthèse classique. « Notre ambition est de révéler de nouvelles molécules et de les modifier pour découvrir de nouvelles activités biologiques », résume Alain Tissier.
L’intérêt du tabac sauvage, Nicotiana sylvestris, est que ses feuilles sont couvertes de cellules, les trichomes, que l’on retrouve aussi dans la menthe ou d’autres plantes aromatiques, spécialisées dans la production d’huiles essentielles.
L’un des savoir-faire de Librophyt consiste à détourner ces glandes, par génie génétique, pour leur faire produire des taxanes, qu’il est ensuite aisé d’extraire. La start-up a déjà testé la technologie pour produire non pas des molécules à vocation thérapeutique, mais destinées à la parfumerie.
CHIMIOTHÈQUES
La constitution par OGM de « chimiothèques » dont on espère tirer des médicaments est en plein essor. Plusieurs sociétés utilisent des bactéries du genre streptomyces. D’autres font produire du lait ou des oeufs contenant des principes actifs par des mammifères ou des poules transgéniques.
Librophyt SA parie sur le tabac, capable de mieux supporter la synthèse de molécules actives, parfois toxiques pour les micro-organismes. Avant elle, Mersitem Therapeutics avait misé sur le maïs pour produire de la lipase, une protéine destinée à lutter contre des troubles liés à la mucoviscidose.
Mais plusieurs de ses essais en champ ont été détruits par les « faucheurs volontaires », au motif notamment que cette plante pourrait contaminer les variétés alimentaires.
Plante d’ornement, Nicotiana sylvestris, à ne pas confondre avec le tabac à fumer, ne peut nourrir ces craintes. Sa version transgénique, espèrent ses promoteurs, sera donc peut-être épargnée par les arracheurs.”