Une proposition de la Commission visant à renforcer davantage la législation relative aux émissions de CO2 pour les installations industrielles a été vivement critiquée par les dirigeants d’entreprises, qui estiment qu’elle pourrait provoquer la fermeture de centrales électriques, entre autres.
Contexte:
La directive de 1996 sur la prévention et la réduction intégrées de la pollution (IPPC) introduit un système de permis visant à prévenir et à limiter la pollution des installations industrielles de grande échelle. Les secteurs couverts concernent aussi bien la métallurgie que les produits chimiques et la nourriture conditionnée, les raffineries et les exploitations agricoles spécialisées dans l’élevage intensif de volailles et de porcs.
Les permis sont émis par les autorités compétentes dans les Etats membres et nécessitent que les opérateurs industriels appliquent meilleures techniques disponibles (MTD) – les techniques les plus rentables pour atteindre un niveau élevé de protection environnementale.
Basés sur les MTD, fixées au niveau européen, les permis comprennent des valeurs limites précises pour les polluants atmosphériques responsables des pluies et du brouillard acides comme le dioxyde de soufre (SO2), les oxydes d’azote (NOx), la poussière et les composés organiques volatiles (COV).
Cependant, la directive actuelle permet aux autorités de tenir compte des caractéristiques techniques de l’installation concernée, sa situation géographique et les conditions environnementales locales lorsqu’il s’agit d’augmenter les limites d’émissions – une liberté dont certains abuseraient, d’après la Commission.
En effet, bien que les Etats membres disposaient de huit ans (jusqu’à octobre 2007) pour s’assurer que leurs installations industrielles étaient totalement en conformité, à peine la moitié des installations dans l’UE se sont vues accorder des permis jusqu’à présent, selon la Commission.
Enjeux:
Les plans de la Commission destinés à réviser les règles actuelles concernant les émissions des installations industrielles dans l’UE sont vivement critiqués par les dirigeants d’entreprise qui les considèrent trop coûteuses et rigides.
La proposition , présentée par la Commission le 21 décembre 2007, cherche à garantir que les règles en vigueur sur les émissions industrielles sont mieux respectées, suite à une révision qui a révélé que la moitié seulement des émissions industrielles dans l’UE se sont vues accorder des permis comprenant des valeurs de limite d’émission de CO2.
Dans le cadre des nouveaux plans, les installations pourraient uniquement s’écarter de l’utilisation des meilleures techniques disponibles (MTD) dans le cadre de conditions spécifiques, ce qui signifie que les gouvernements ne pourront plus être flexibles avec certaines installations en fonction de leur localisation ou de leur conception.
Cette disposition constitue la principale pierre d’achoppement pour l’industrie, qui repose sur de telles exemptions pour maintenir certaines centrales plus anciennes en fonctionnement. La Commission a déclaré qu’elle examinera la possibilité d’introduire davantage de flexibilité par le développement de règles européennes sur l’échange d’émissions pour le NOx et le SO2 – des règles similaires à celles en vigueur pour le CO2 – même si aucune disposition de ce type n’est incluse dans la proposition législative.
Les limites d’émissions minimales pour les grandes centrales de combustion seraient renforcées dans le cadre de nouvelles règles et les centrales de taille moyenne générant entre 20 et 50 MegaWatts (MW). Les activités comme la production de coffrages en bois et la préservation du bois – jusqu’à présent exclues du champ d’application de la directive – seraient soumises à des valeurs limites, afin de garantir que tous les Etats membres reçoivent le même niveau de protection environnementale.
En outre, la proposition introduit des dispositions minimales concernant les inspections environnementales des installations, une révision des conditions d’octroi de permis et un report sur le respect des dispositions. Des mesures incitatives pour le développement et la promotion de technologies favorables à l’environnement sont également incluses.
Positions:
Stavros Dimas, commissaire européen à l’Environnement a déclaré que : « Les émissions industrielles dans l'Union européenne sont encore trop importantes et portent préjudice à la santé humaine et à l'environnement. (…) Il incombe à l'Union de veiller à ce que les entreprises respectent leurs obligations et utilisent les meilleures techniques disponibles ».
Selon la Commission, soumettre l’octroi de permis à certaines conditions en ce qui concerne l’utilisation des MTD aura un effet positif de réaction en chaîne sur la santé et l’environnement, dépassant considérablement les coûts que les installations auront à payer pour être en conformité avec la nouvelle directive.
En effet, elle prévoit que les réductions d’émissions réalisées dans les grandes centrales de combustion pourraient engendrer, à elles seules, des bénéfices nets allant de 7 à 28 milliards d’euros par an et devraient réduire les décès prématurés et la diminution des années de vie respectivement de 13 000 et 125 000.
La Commission ajoute également que la proposition de directive réduira les coûts administratifs pour les autorités et les opérateurs de 205 millions à 225 millions d’euros par an, contribuant ainsi à la durabilité future de l’industrie européenne.
Cependant, selon le Financial Times, BusinessEurope, qui représente les intérêts des employeurs européens, affirme que le coût de la mise en conformité pourrait obliger de nombreuses centrales à fermer. Comme le déclare l’organisation dans une lettre adressée à la Commission, ces directives imposeront un coût disproportionné à l’industrie, entraînant une réduction de la production en Europe plutôt que d’encourager l’innovation et l’investissement dans les technologies propres.
L’association affirme qu’elle préfèrerait maintenir le système actuel, qui permet aux gouvernements de conserver une certaine flexibilité concernant l’octroi des permis. De plus, l’introduction d’un système d’échange pour les substances polluantes comme le NOx et le SO2 a très peu de chance de fonctionner.
Développements récents et prochaines étapes:
- 21 déc. 2007 : la proposition a été transmise au Conseil et au Parlement pour être examinée en 2008.
Liens
- Commission (press release): Environment: Commission takes steps to cut industrial emissions further [FR] [DE] (21 December 2007)
- Commission (memo): Questions and Answers on the Commission's proposal for the revision of industrial emissions legislation in the EU (21 December 2007)
- Commission: Proposal for a Directive on industrial emissions (integrated pollution prevention and control) [FR] [DE] (21 December 2007)
- Commission: Communication "Towards an improved policy on industrial emissions" [FR] [DE] (21 December 2007)
- Commission: Impact Assessment (21 December 2007)
- Commission: Impact Assessment - Executive Summary [FR] [DE] (21 December 2007)
- Commission (DG Environment): The IPPC Directive: Towards a future policy on industrial emissions
- Financial Times: Industry attacks EU green legislation